Où est l’Etat ?
Par R. Mahmoudi – Les graves développements que connaît la crise politique liée à la présidentielle du 17 avril et la violence urbaine qui continue à endeuiller la population de la vallée du M’zab sont autant d’indicateurs alarmants d’une situation d’impuissance, voire de non-Etat. Une situation inédite depuis l’indépendance, où l’on ne sent plus l’existence de l’autorité et où tout le monde peut faire ou dire ce qu’il veut, sans craindre d’être interpellé, ni même d’être dissuadé. Les déclarations hérétiques d’un Amar Saïdani, portées par cette permissivité ambiante, les accusations infâmes lancées par un ancien moudjahid contre ses frères (et sœurs) de combat et le rappel de tous les anciens proscrits de la République dans ce débat débridé sont symptomatiques de cette déliquescence d’un Etat pris en otage par des dignitaires plus préoccupés par leur survie et celle de leur caste que par l’honneur des institutions de la République. L'Etat est chaque jour bafoué par des aventuriers politiques, dont l’apparition montre le degré atteint par ce processus de régression qui s’accélère aujourd’hui. L’autre grande plaie qui ronge la République et qui commence à se transformer en gangrène fatale : le drame qui se joue dans la région de Ghardaïa. Là encore, l’absence de l’autorité, aggravée par l’échec du gouvernement, fait craindre le pire au moment où des observateurs avisés mettent en garde contre un basculement irréversible dans ce conflit qui n’aurait jamais atteint une telle proportion si l’Etat, à travers ses représentants au plus haut niveau de la responsabilité, avait su réagir pour parer à cette dérive. Le retour à «la solution sécuritaire», avec un déploiement exceptionnel des forces combinées dans cette région livrée au chaos, peut être un remède momentané, mais ne saurait suppléer à la présence pérenne de l’Etat, y compris sur le plan symbolique. Le gouvernement, par incompétence, par cécité politique ou par volonté de manipuler, croyait pouvoir rétablir le calme en prodiguant sa vieille recette bureaucratique qui n’aura fait qu’envenimer la situation. Heureusement, dirait-on, que les forces de sécurité sont encore là pour empêcher que l’Algérie devienne un Etat failli. Parce qu’on en est effectivement là.
R. M.
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