Il a fait la guerre seul ?
Par Kamel Moulfi – Les propos de Yacef Saâdi dans Echorouk, où il s'attaque aux chouhada et aux moudjahidine, ont encore choqué les Algériens bien qu’il n’en soit pas à sa première dérive sur ce registre. Il a commencé, il y a bien longtemps, par dénigrer les moudjahidine d’origine européenne pour tenter de discréditer leur engagement. Il s’est ensuite attaqué aux femmes, Louisa Ighilahriz, Fatiha Bouhired puis Zohra Drif, et maintenant il ose s’en prendre à un monument de la lutte de Libération nationale, Larbi Ben M’hidi, auquel, pourtant, ses assassins colonialistes n’ont jamais manqué de rendre hommage, à chaque fois qu’ils l’évoquent. C’est comme si, par ses petites phrases, Yacef Saâdi voulait redorer son «blason» terni par plein de rumeurs sur son comportement douteux, aux yeux de nombre d’observateurs, particulièrement au cours et après son arrestation par les parachutistes. Il pense, sans doute, que le meilleur moyen de se revaloriser est de salir les autres. Yacef Saâdi ignore le testament laissé par Didouche Mourad : «Si nous venions à mourir, défendez nos mémoires.» Il fait l’exact contraire. En même temps, il réduit le combat pour l’indépendance à une histoire de bombes qu’il a fait exploser ici et là, à Alger. Certes, les faits d’armes, le coup de feu comme on dit, ont été parfois la seule trame des récits sur la guerre de Libération nationale, au point où les rescapés qui racontent leurs «actes héroïques» devant la caméra ont toujours pris à témoin les pierres et les montagnes, regrettant presque qu’elles ne puissent parler pour attester de la véracité de leurs témoignages. Or, le plus important dans l’engagement des moudjahidine et particulièrement de ceux qui y laisseront leur vie, les chouhada, est dans les valeurs – le patriotisme, la liberté, la justice, la solidarité… – qui les ont fait bouger et dans l’idéal que leur sacrifice a incarné : une Algérie libre et heureuse, pour tous. C’est là que se trouve l’exemplarité à faire connaître à la nouvelle génération. Si Yacef Saâdi veut se présenter comme un héros et le seul, il doit se rappeler le slogan écrit sur les murs d’Alger dès les premiers jours de l’indépendance : «Un seul héros, le peuple». Ce slogan visait surtout les survivants de la guerre de Libération et particulièrement ses chefs. Il était accompagné d’un autre plus explicite : «A bas le culte de la personnalité». Lui, qui a eu le geste indécent de se courber pour baiser la main du Président, il est totalement disqualifié pour porter des jugements sur les combattants de la libération nationale.
K. M.
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