Quatrième mandat : la campagne virtuelle de Bouteflika
La direction de campagne d’Abdelaziz Bouteflika a officiellement lancé un site web dédié au scrutin présidentiel de 2014. Une page internet inédite dans sa conception puisqu’au lieu de proposer aux citoyens algériens une perspective d’avenir, elle les invite à regarder en arrière. Quinze années de rétrospective et de bilans en tous genres, appuyées par des vidéos du président valide et en pleine forme, assurant meetings populaires et s’offrant des bains de foule. Les appuis de Bouteflika poussent ainsi le concept de la campagne virtuelle jusqu’au bout, en proposant un montage d’images dépassées et d’archives, seule manière de présenter aujourd’hui le président à son avantage. Pour faire taire les critiques quant à cette obstination à vouloir appuyer un président clairement diminué, les animateurs de campagne ont reçu pour directive de répéter inlassablement la même phrase : «Si le Président n'était pas apte à gouverner, aurait-il reçu les personnalités étrangères et ces dernières auraient-elles caché que Bouteflika était impotent ?» Un argument que Amara Beyounès, chef du MPA et fervent défenseur de la candidature au quatrième mandat de Bouteflika, n’a pas manqué de dégainer lors de sa récente sortie médiatique sur la chaîne privée Dzair TV. Benyounès et ses amis de la direction de campagne de Bouteflika semblent oublier l’humiliante mise au point des médias français qui ont relevé plusieurs jours durant, au mois de décembre 2013, que l'état de santé du président algérien était très précaire, reprenant la déclaration du Premier ministre, Ayrault, suite à sa visite en Algérie. Malgré les faits, l’entourage de Bouteflika s’enferme dans une bulle de déni, l’objectif étant de concrétiser le quatrième mandat coûte que coûte et de poursuivre un plan déjà tracé par le clan présidentiel pour les années à venir. Pour y parvenir, tous les moyens sont bons, y compris de faire campagne à la place du président malade afin de le faire élire coûte que coûte. Ainsi, en plus des moyens virtuels cités plus haut, la campagne électorale ne sera assurée que par l’entremise de tierces responsables parfois spécialement rappelés – alors qu’on les disait en disgrâce, à l’image d’Ahmed Ouyahia – pour renforcer les rangs des animateurs de campagne qui sont chargés de se déplacer et de parler à la place de Bouteflika à travers le pays et à l’étranger. En plus de Abdelamalek Sellal, Amar Saïdani, Amar Ghoul, Amara Benyounès, Abdelaziz Belkhadem, Abdelakader Bensalah et Ahmed Ouyahia sont déjà sur le terrain pour défendre le bilan de Bouteflika en attendant le lancement officiel de la campagne électorale. Des documents officiels ont été rédigés et prêts à être utilisés en tant qu’instruments de propagande pro-quatrième mandat. Les arguments sont bien sûr toujours tirés du passé, et rarement axés sur l’avenir qui attend les Algériens, et qui risque d’être plutôt difficile, étant donné la conjoncture économique et politique mondiale très préoccupante.
Meriem Sassi