Normalisation des relations algéro-françaises : jusqu’où peut aller la compromission ?
Un mois après la participation de l’Algérie aux festivités de la fête nationale française du 14 Juillet, avec la présence du ministre de l’Energie et des Mines, Youcef Yousfi, un autre pas vient d’être franchi avec cette participation officielle à la commémoration du 70e anniversaire du débarquement de Provence, prévue demain vendredi à Toulon, du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, qui représentera le chef de l’Etat, et la présence «symbolique» d’une douzaine d’anciens combattants algériens. Contrairement au premier événement, cette deuxième annonce n’a suscité aucun commentaire de la part de la «famille révolutionnaire», représentée notamment par l’ONM et les organisations des enfants de chouhada, et de celle des partis politiques si prompts à vilipender le pouvoir sur ses «compromissions» avec l’ancien colonisateur, alors que la présence algérienne est cette fois-ci encore plus assumée. Le plus grave est que le gouvernement algérien ne cherche même pas à expliquer sa démarche ni à justifier ce niveau de représentation qui, en d’autres époques, aurait soulevé un tollé général. Que gagnerait l’Algérie à se compromettre si gratuitement dans ce rapprochement à sens unique avec la France, au moment où le gouvernement français ne fait aucun effort, aucun geste, pour exprimer une quelconque réciprocité ? Quel sera le prochain signe de soumission d’Alger à la volonté française ? Y a-t-il un pacte non écrit entre Paris et Alger ? Autant de questions qui nourrissent des suspicions légitimes. Si pour Paris, la volonté d’assainir les relations avec Alger s’expliquerait par le besoin de garantir ou d’accroître ses parts de marché en Algérie dans la conjoncture de crise endémique que traverse la France, en essayant de profiter des faiblesses conjoncturelles, réelles ou supposées, du pouvoir algérien, les Algériens n’ont eu, eux, que de fausses promesses sur les conditions de livraison de visas, par exemple, et voudraient bien voir ce que les Français ont à leur proposer, en contrepartie, pour mériter cette preuve d’amitié, en dehors d’une promesse de partenariat stratégique qui ne verra jamais le jour. On sait déjà que, sur la question du passé colonial de la France en Algérie, aucune «repentance» n’est envisagée de l’autre côté de la Méditerranée. Laurent Fabius l’a rappelé il y a quelques semaines. S’agissant des autres aspects liés à la coopération économique et sécuritaire, il est clair que c’est Paris qui a toujours besoin d’Alger, et non l’inverse.
R. Mahmoudi