Algérie : opposition divisée vs pouvoir illégitime
Si l'opposition officielle, en partie réunie au sein de la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD) et du Pôle pour le changement démocratique, et constituée, en majorité, d'anciennes figures des pouvoirs précédents, qui ne sont pas soutenues par des partis politiques ayant une large base militante, est incapable de rassembler des centaines de milliers, voire des millions de personnes, à travers tout le pays ou dans la capitale, comme le fait par exemple l'opposition au Yémen ou au Pakistan, ses discours resteront des vœux pieux et de stériles péroraisons de salons. Pour le moment, malheureusement, dans les quelques manifestations auxquelles cette opposition a appelé ou qu'elle avait soutenues, il y avait plus de policiers en uniforme ou en civil que de manifestants. En tout état de cause, tant qu'il le pourra – et pourquoi devrait-il s'en priver ? –, le clan présidentiel, qui contrôle la police et l'ANP, n'hésitera pas un seul instant à utiliser leur puissance de répression et de feu pour mater et tuer dans l'œuf toute tentative de manifestation dans laquelle le peuple algérien ne se serait pas massivement investi. Si elle est donc incapable de mobiliser les foules, l'opposition officielle algérienne ferait mieux de s'en remettre au sort, qui fait souvent bien les choses. En effet, ses appels au secours, adressés tantôt à l'armée, tantôt au peuple algérien, deviennent vraiment pathétiques, à l'instar des dernières déclarations de Soufiane Djilali, le président du parti Jil Jadid et l'un des leaders les plus actifs de cette opposition, sur le rôle de l'ANP, qu'il accuse d'avoir failli à son devoir constitutionnel de protection du pays contre les menaces extérieures et intérieures, telles les exactions graves commises par les prédateurs du clan présidentiel depuis 1999, au motif que c'est l'ANP qui imposa Bouteflika au peuple algérien, par la force et la fraude massive, comme lors de la mascarade du 17 avril 2014, malgré son incapacité physique, mentale et morale à assumer correctement ses fonctions et le bilan désastreux de sa gouvernance, dans de nombreux domaines. Soufiane Djilali oublie ou feint d'oublier qu'Abdelaziz Bouteflika est encore constitutionnellement le chef suprême des forces armées algériennes et ministre de la Défense nationale et, qu'en tant que tel, il a durant son long règne profondément remanié et remodelé la composante humaine du commandement de l'ANP, tous corps confondus.
Il a ainsi reconfiguré le centre du pouvoir réel en sa faveur en nommant, à tour de bras, par décrets publiables et non publiables, ses fidèles et ses obligés aux postes stratégiques de l'administration militaire et civile algérienne, et en limogeant et en envoyant abusivement à la retraite la majorité des «décideurs» qui l'ont installé au pouvoir en 1999, dans les conditions scandaleuses que l’on sait. Ceux qui restent encore en activité sont aujourd'hui isolés et leurs prérogatives souvent réduites à leur plus simple expression. La politique de «nettoyage administratif», pratiquée à outrance contre les cadres de la nation qui ne font pas partie du clan présidentiel et de ses serviteurs zélés, fondé sur le népotisme, le régionalisme et la corruption généralisés, se poursuit toujours à travers la décision scélérate dite «circulaire de Sellal», spécialisé comme son fameux prédécesseur dans le sale boulot, et qui vise à mettre à la retraite d'office les cadres opposés à la politique prédatrice du clan présidentiel, qui a fait fuir du pays, depuis son avènement au pouvoir, près d'un million de compatriotes, dont 200 000 cadres supérieurs, moyens, techniciens et ouvriers qualifiés. Cette discrimination criminelle, qui frise le racisme, grosse de tous les risques pour la cohésion, la stabilité, la sécurité et l'unité nationales, doit être dénoncée avec la plus grande vigueur et ses promoteurs châtiés de manière exemplaire. Quant au peuple algérien, qu'Abdelaziz Bouteflika a toujours méprisé et qui le lui rend bien, dès qu'il en a l'occasion, en le huant et en caillassant copieusement son véhicule comme lors des visites, en Algérie, des présidents Chirac, Sarkozy et Hollande et de la visite de Bouteflika à la wilaya de Boumerdès après le terrible séisme qui a ravagé cette wilaya en 2003, il veut l'amadouer avec le pain, la religion et l'argent de la corruption qu'il lui offre à gogo, grâce à l'exploitation sauvage des ressources naturelles non renouvelables du pays et à leur bradage aux compagnies étrangères pour acheter le silence de leurs pays respectifs sur les abus, méfaits et forfaits de son clan de prédateurs cupides et obstinés.
Rabah Toubal