Affaire de l’autoroute : la défense plaide l’«absence de preuves»

Le procès de l'autoroute Est-Ouest se poursuivait ce samedi au tribunal criminel d'Alger avec les plaidoiries de sept avocats de la défense, représentant un nombre d'accusés, qui ont requis la relaxe de leurs clients, a constaté l'APS. C'est Me Toukal Mohamed qui représente le groupe COBA (Portugal), qui a inauguré la séance, affirmant que les contrats conclus par son mandant étaient légaux et que la société «n'a jamais versé» de pots-de-vin ni de commissions. En ce qui concerne le groupe canadien S. M. Inc, Me Daliou Salim a rappelé dans son plaidoyer que cette entité était présente en Algérie depuis 2005 et qu'elle avait réalisé plusieurs grands projets au profit de l'Etat algérien. Aucun ne lie le groupe canadien S. M. Inc avec le ministère des Travaux publics ni avec l'Agence nationale des autoroutes (ANA), a soutenu l'avocat ajoutant que le groupe avait conclu un contrat de sous-traitance avec le consortium chinois Citic-CRCC pour effectuer quelques travaux au niveau de l'autoroute. Il a réfuté le moindre versement par son client dans le compte de Addou Tadj Eddine. Le ministère public avait fait état, vendredi, dans son réquisitoire de fonds versés par le groupe canadien dans le compte de l'accusé Tadj Eddine Addou. De son côté, Me Kamel Maachou (pour Isolux Corsan) a estimé que l'affaire concernait des fautes commises par des individus non des entreprises, mettant en garde contre des «atteintes de l'étranger» visant l'Algérie. Il a réfuté toute implication de son mandant (groupe espagnol) dans la corruption ou l'abus de pouvoir. L'accusation est basée sur les propos de l'accusé Addou Sid Ahmed devant les services de sécurité sur lesquels il est revenu durant l'enquête, a-t-il argué. Dans sa plaidoirie en faveur des frères Bouznacha, poursuivis pour violation de la législation et du règlement relatifs aux changes et aux mouvements des capitaux de et vers l'étranger, Me Benarbia Chaouki a relevé l'absence dans le dossier du procès-verbal de constat des faits. Le service des douanes en charge de ce dossier n'a pas accompli son travail et n'a donc pas établi le procès-verbal de constat nécessaire pour l'inculpation des frères Bouznacha. Il a, par conséquent, requis «la nullité des procédures judiciaires». L'avocat du groupe japonais COJAAL, Me Chenaif, a quant à lui souligné le recours de son client à l'arbitrage international contre une entreprise algérienne n'ayant aucune relation avec le projet de l'autoroute, mais concernée par certains équipements que le groupe avait fournis à la Direction des nouveaux programmes, précisant que COJAAL avait adressé une demande écrite à Mohamed Khelladi en sa qualité de directeur de projet, lequel n'a pas donné suite à sa demande. Me Nachef Farid a, pour sa part, plaidé en faveur de Ouzane Mohamed, dit Colonel Khaled, requérant la disculpation de son client du chef d'accusation de perception de pots-de-vin. Les sept avocats des inculpés (Addou Tadj Eddine, homme d'affaires, Bouchama Mohamed Amine, ancien secrétaire général au ministère des Travaux publics, le groupe suisse Pizarroti, Ghazali Ahmed Rafik, cadre supérieur à l'ANA et Ferachi Belkacem, cadre supérieur au ministère des Transports), ont tour à tour requis l'acquittement des prévenus pour «absence d'expertise technique dans le dossier et manque de preuves». Des peines de prison d'une année à 20 ans ont été requises, vendredi, par le procureur général contre les personnes impliquées dans l'affaire de l'autoroute Est-Ouest.
«Des peines infondées»
Des membres de la défense des accusés poursuivis dans l'affaire de l'autoroute Est-Ouest ont qualifié d'«infondées» les peines d'un an à 20 ans de prison ferme requises par le ministère public contre les mis en cause. Dans une déclaration à l'APS, des membres de la défense ont précisé que les réquisitions prononcées par le parquet contre les accusés, allant d'un an à 20 ans d'emprisonnement, étaient «infondées» et «disproportionnées», estimant que le dossier de l'affaire comportait des «vides juridiques». Me Sidhoum Amine, avocat de l'accusé principal, Chani Medjdoub, poursuivi pour «association de malfaiteurs, abus d'influence, corruption et blanchiment d'argent», a précisé que «le réquisitoire du parquet a été centré sur des généralités en omettant l'aspect technique». Pour sa part, Me Nachef Farid, avocat de l'accusé Ouazan Mohamed, surnommé Colonel Khaled (fonctionnaire au ministère de la Justice), a estimé que la peine de 3 ans d'emprisonnement assortie d'une amende de 1 million de dinars, requise par le parquet contre son client en l'absence d'une «preuve tangible» concernant son implication, était «disproportionnée». Me Benarbia Chouki, avocat des frères Bouznacha, deux commerçants poursuivis pour «violation à la législation et aux lois relatives au change et au mouvement des capitaux de et vers l'étranger» a estimé que «les réquisitions du parquet portant sur un an d'emprisonnement contre les deux accusés étaient “infondées” du fait que les procédures prises à leur encontre étaient “illégales” ». Pour sa part, Me Merrah Youcef, avocat de Addou Tadj Eddine (homme d'affaires), poursuivi pour les chefs d'accusation de «association de malfaiteurs, abus d'influence, corruption et blanchiment d'argent», a indiqué que les réquisitions du parquet étaient «disproportionnées», notamment en l'absence d'une partie civile. Me Boudaliou Salim, avocat de l'entreprise canadienne S. M. Inc, chargée du contrôle technique externe de l'autoroute, partie ouest, a estimé que les 5 millions de dinars d'amende requise par le parquet contre l'entreprise était «infondée». Le même constat a été fait par l'avocat du groupe Isolux Corsan qui a estimé que les réquisitions étaient «infondées et injustifiées». Pour sa part, Me Toukal Mohamed, avocat de l'entreprise portugaise Coba, a indiqué que l'amende de 5 millions de dinars requise contre les sept entreprises étrangères poursuivies dans l'affaire était «disproportionnée».
La défense de Mejdoub demande l'annulation des procédures des poursuites
Le procès a été marque par l'appel de la défense de l'accusé principal, Chani Mejdoub, d'«annuler les procédures des poursuites». Composée des avocats Zahia Ait Amer et Tayeb Belaarif, la défense de Chani Mejdoub a demandé «l'annulation des procédures des poursuites car les procédures juridiques de l'arrestation par la police judiciaire n'avaient été respectées». La défense a rappelé que son client «a été arrêté à l'aéroport Houari Boumediene par la police judiciaire militaire qui l'a emmené à un lieu inconnu où il a été interrogé sous l'intimidation». Le prévenu «avait été interdit de contacter sa famille alors que la loi prévoit que tout prévenu en garde à vue a le droit à la visite familiale et à l'examen médical», a plaidé la défense qui a ajouté que «tous ces droits ont été violés» appelant à l'annulation des procédures de poursuites. Ces erreurs relèvent de personnes et non d'institutions, a-t-elle soutenu. La défense a rappelé également que Chani Mejdoub occupait effectivement le poste de conseiller juridique auprès du consortium chinois Citic-Crcc avec lequel il a travaillé sur les aspects administratifs relatifs au projet de l'autoroute est-ouest sans toutefois avoir versé de commissions à aucune partie.
R. N.
 

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