Le cercueil encerclé
Par R. Mahmoudi – Un des faits saillants qui a marqué les funérailles de Hocine Aït Ahmed, dans son village natal, ce vendredi, c’est que nul n’a, en fait, réussi à en tirer des dividendes politiques. Car c’est le propre même des politiques, pourrait-on dire, de jouer les désintéressés dans ce genre de situations. Ni le pouvoir, dont les représentants officiels ont été hués et, pour certains, empêchés d’assister à l’enterrement et dont les véhicules ont été caillassés. Ni Mouloud Hamrouche qu’on présentait comme l’éventuel «dépositaire» du legs d’Aït Ahmed et qui était, comme toutes les autres personnalités politiques, «dilué» dans la marée humaine qui a accompagné le défunt à sa dernière demeure et l’a littéralement encerclé jusqu’à sa mise en terre. Ni même les dirigeants du FFS qui n’ont pas, non plus, émergé ou réussi à organiser une oraison funèbre qui leur aurait offert cette possibilité de pavoiser devant le peuple. Ils s’y étaient, pourtant, tous préparés. Ils avaient certainement surestimé leur capacité à juguler la masse et à se faire respecter. Tous les calculs des uns et des autres ont été faussés par cette éruption populaire incompressible, dont personne n’aurait imaginé l’ampleur et la spontanéité, et qui est venue rappeler non seulement aux politiques, mais surtout au pouvoir en place, une donne essentielle qui était de tout temps exclue du débat politique et dont il faudrait tenir compte désormais : le peuple. Une notion qui peut paraître trop abstraite pour être cernée ou intégrée dans une réflexion, mais c’est une force qui existe et qui, tel un volcan, peut emporter tout sur son passage. Selon les témoignages recueillis auprès de ceux qui se sont déplacés au village Aït Ahmed, les funérailles de Da L’hocine ont failli dégénérer en émeute et on a vu ressurgir les vieux slogans hostiles au pouvoir qui ont rappelé à tout le monde les sombres printemps qui ont fait, par le passé, tant de ravages. Il aurait suffi d’un geste de provocation pour le feu reprenne.
R. M.
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