Raccourci facile
Par Houari Achouri – «On» lui a proposé la présidence de la République et «il» a refusé. Le raccourci était tellement facile que le mode indéterminé suffisait à comprendre de qui et de quoi il s’agissait. Et, en plus, vraisemblable : en janvier 1992, la dissolution de l’APN et la démission du président Chadli ont créé un vide dans ces deux institutions et mis le pays dans une impasse constitutionnelle ; l’ANP était la seule institution à demeurer intacte et Aït Ahmed, personnalité historique non compromise avec le pouvoir, pouvait être l’homme de la situation. Enfin, le raccourci était rendu crédible par les faits réels : le général Nezzar, en sa qualité de ministre de la Défense nationale, à l’époque, «accompagné d’Ali Haroun», a rencontré Aït Ahmed dans cette circonstance. Puis ce raccourci, chemin faisant, s’est nourri de la paresse intellectuelle qui empêche de lire et donc de vérifier. Car la simple consultation du livre du général Nezzar, écrit en 2003, à propos justement de la désinformation, aurait suffi à connaître la vérité sur la discussion entre les deux hommes durant leurs rencontres. Le général Nezzar a fait une déclaration (voir article d’Algériepatriotique) pour rappeler ce qu’il a écrit bien avant le décès d’Aït Ahmed. Et Ali Haroun, pour sa part, a transmis à El Watan un démenti (publié dans la version papier et en PDF) des propos qui lui ont été prêtés. C’est clair, le général Nezzar n’a pas proposé à feu Aït Ahmed d’être président de la République, mais d’apporter sa contribution à la sortie de la situation créée par la démission du président Chadli. L’histoire contemporaine de l’Algérie comporte plein d’idées reçues colportées comme des légendes ou des fables, certaines sont carrément incroyables, mais n’ayant pas l’allure de mensonge, elles passent facilement dans l’opinion, et d’autres plus vraisemblables, tout en étant aussi fausses, sont tenaces et résistent à la vérité. Heureusement, quand elles concernent le temps présent, les acteurs témoins directs, encore vivants, peuvent rétablir les faits.
H. A.
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