Un bac éclaboussé
Par Kamel Moulfi – Quelle crédibilité aura le baccalauréat session juin 2016 et quelle signification auront les résultats qui seront proclamés dans quelques semaines ? L’an dernier, la ministre de l’Education, Nouria Benghebrit, pouvait s’enorgueillir d’un taux de 51,36%, nettement plus élevé que les 45,01% enregistrés en 2014 quand, fraîchement nommée, elle avait pris l’opération en cours de route. Mais cette année, les fuites massives de sujets facilitées par internet et par la circulation sur les réseaux sociaux, et exploitées comme une aubaine et sans scrupule par un nombre indéterminé de candidats insuffisamment préparés aux épreuves, ont porté un coup qui s’est avéré fatal à l’examen du bac. La bataille contre la fraude high-tech a été lamentablement perdue par le ministère et le bac algérien sérieusement, et faut-il le craindre, durablement déstabilisé par un «ennemi intérieur» qu’il sera difficile de déloger dans un contexte national où les pratiques immorales et combines illégales, attisées par la cupidité, sont plus fortes et mieux «récompensées» que les valeurs de l’honnêteté et du mérite. Les fuites massives de sujets ont contraint les pouvoirs publics à faire repasser l’examen à plusieurs centaines de milliers de candidats en plein Ramadhan, c’est-à-dire dans des conditions plus dures que pour la session initiale et il faudra s’attendre à de vives contestations de la part de ceux qui échoueront et qui auront l’argument facile du jeûne à faire valoir en plus du climat psychologique d’un «bac sous haute surveillance» qui a marqué la session de rattrapage. Les correcteurs seront-ils tentés d’appliquer un coefficient pour compenser ces handicaps ? Nouria Benghebrit n’ignore sans doute rien de cela et sait que le plus dur a commencé pour elle. Elle ne pourra pas pavoiser en présentant les pourcentages de réussite, quels qu’ils soient. Quant aux «heureux lauréats», on imagine déjà que la fête n’aura pas le même goût que d’habitude. Leur succès restera toujours entaché du soupçon de triche qui a éclaboussé toutes les filières.
K. M.
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