Londres remet Sarkozy à sa place : «Vos propos sur les réfugiés sont inacceptables»
La Grande-Bretagne et la France, directement affectées par le problème des flux incessants de réfugiés après que ces deux pays se sont unis pour renverser Mouammar Kadhafi et détruire l’équilibre fragile en Libye, se rejettent désormais la responsabilité dans la gestion de la situation des migrants coincés dans un camp à Calais, à l’extrême nord de la France. Paris qui s’est trouvé directement confronté à ce problème quasi-ingérable, menace, par la voix de son ex-président et candidat de la droite dans la course à l’Elysée, Nicolas Sarkozy, de déplacer le camp «de l’autre côté de la Manche».
Londres a répondu avec célérité à cette provocation par un refus catégorique, quitte à mettre en péril les relations entre les deux capitales. La Grande-Bretagne, qui a dépêché, ce mardi, son ministre de l’Intérieur, Amber Rudd, à Paris pour s’entretenir avec son homologue français, Bernard Cazeneuve, persiste et signe. «Les propos de Sarkozy sont inacceptables», objecte le gouvernement britannique qui a décrété que le camp des réfugiés «ne bougera pas de Calais». La Grande-Bretagne met en avant le traité du Touquet, signé par Nicolas Sarkozy lui-même en 2003. Ce traité permet aux services britanniques de l’immigration de procéder au contrôle des passeports au niveau du port de Calais, mais s’engage, le cas échéant à coopérer avec les autorités françaises pour «protéger la zone frontalière commune» à Calais.
Pour la droite française qui espère revenir aux commandes en 2017, il n’y a aucune autre alternative. Nicolas Sarkozy cherche à engager un bras de fer avec Londres pour se débarrasser du camp de Calais qui s’est transformé en une zone de non-droit, abritant plus de 9 000 réfugiés dans des conditions inhumaines, dont des enfants non accompagnés, qui tentent chaque jour, au risque de leur vie, de traverser le tunnel sous la Manche pour rejoindre le Royaume-Uni.
La situation sécuritaire sur place évolue dangereusement. Des affrontements ont lieu quasi-quotidiennement entre groupes de migrants et les forces de l’ordre, notamment durant cette période estivale. Des violences qui ont contraint les autorités françaises à déployer de nouveaux renforts policiers pour sécuriser la zone portuaire.
Le président du conseil régional du Nord-Pas-de-Calais-Picardie, Xavier Bertrand, a emboîté le pas au chef de file des Républicains, et menacé, hier (mardi), sur la chaîne de télévision britannique BBC, de «rendre caduques» les accords du Touquet «si Londres refuse de s’engager dans des discussions, en vue de l’ouverture d’un centre de traitement des demandes d’asile pour les candidats qui souhaitent se rendre au Royaume-Uni». Une proposition jugée absurde par un officiel britannique cité par The Independent, qui a expliqué qu’une telle démarche «constitue, à elle seule, un message d’encouragement à des milliers de migrants qui envisagent de gagner la Grande-Bretagne de se précipiter vers le port de Calais, avec tous les risques que cela comporte, sur le plan sécuritaire notamment».
De Londres, Boudjemaa Selimia
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