La Tunisie et l’Algérie accusées à tort
Par Akli Tira – La nationalité tunisienne de l’auteur présumé de la tuerie de Berlin la semaine dernière, et qui a été abattu par la police italienne ce matin à Milan, vient rajouter au sentiment anti-maghrébin qui traverse une société allemande frappée par le terrorisme qui l’avait plus ou moins épargnée jusqu’alors. Le mode d’action du criminel, analogue à celui d’un autre tunisien qui a commis le massacre de Nice, dans le sud-est de la France, en écrasant des dizaines de piétons sous les roues d’un camion de gros tonnage, suffit pour établir l’axiome raciste «Tunisiens égal terroristes».
Quand l’amalgame trompe les foules choquées par les attentats, on peut espérer un retour à la raison avec le temps. Il prend des tournures plus dangereuses lorsque les Etats s’y laissent prendre. Ainsi, il arrive souvent que les autorités d’un pays confronté à l’urgence des opérations de reconduite d’immigrés clandestins vers leurs pays d’origines versent dans une autre confusion ; celle des nationalités.
L’Allemagne, malgré sa réputation de démocratie scrupuleuse, ne fait pas exception et s’autorise les approximations dont ne peuvent pas s’accommoder les pays destinataires des immigrés expulsés. C’est ce qui explique les réticences et les refus d’Etats souverains, telle la Tunisie accusée de ne pas avoir accepté de rapatrier Anis Amri. Comme si les Tunisiens n’étaient pas en droit de prendre le temps de vérifier l’identité du clandestin qu’on a voulu lui adresser a fortiori dans un contexte de mobilité inquiétante des terroristes de la fabrique Daech.
Ce procès d’intention vise aussi Alger, concerné par un protocole d’accord algéro-allemand de 1997 qui stipule que «les autorités algériennes réadmettront sans formalité les ressortissants algériens séjournant de manière illégale sur le territoire national de la République fédérale d’Allemagne, même lorsque ceux-ci ne sont pas en possession d’un passeport ou d’une carte d’identité valides, à condition qu’il soit prouvé ou démontré de manière crédible que lesdites personnes possèdent la nationalité algérienne». Notre ambassade d’Algérie en Allemagne peut attester que «la preuve et la démonstration» ne sont pas toujours apportées. On se souvient du bras de fer en 2010 avec les autorités bulgares.
Même crispation en Belgique, où des Marocains se font passer pour des Algériens. Il faudra peut-être attendre que la généralisation de l’état civil biométrique dans le monde permette, à l’avenir, de réduire les usurpations d’identité et de nationalité. Encore faut-il que l’échange de données ne serve pas à entamer davantage les souverainetés et soit fondé sur la confiance mutuelle absolue.
A. T.
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