La chronique laconique de M. Aït Amara – Obsèques bizness et fantasmes refoulés
Résumons. Y a-t-il meilleur endroit qu’un cimetière pour enterrer la hache de guerre ? Les obsèques des hauts responsables relèvent moins du religieux que du politique. Révérences obséquieuses, poignées de mains visqueuses, accolades vicieuses et sourires larges comme ça, comme si le lieu lugubre et le contexte funeste se muaient par enchantement en une frairie. C’est ainsi qu’on voit, cependant que les proches éplorés accompagnent l’être chéri à sa dernière demeure, des dignitaires joignant l’utile au rituel, affairés à s’échanger les politesses et à poser pour les photographes. Les vives querelles sont mises en terre avant même que le mort y soit.
Résumons. Alors que nous nous triturons les méninges pour tenter de lire dans les pensées du président de la République, Abdesselam Bouchouareb sait ; le futur Premier ministre, c’est lui. Du moins, l’a-t-il murmuré à l’oreille d’Emmanuel Macron à Alger. C’est Maghreb Confidentiel qui a révélé le fantasme de celui qui se présente comme le successeur patenté de son chef et qui se projette déjà dans l’avenir, alors que la complexité de la situation présente lui dicte de plancher plutôt sur les dossiers empilés sur son bureau et qui attendent d’être libérés de sa main bureaucratique atrophiée. Il se murmure que des choses pas toujours nettes s’ourdissent dans l’antre secret de celui dont l’amplitude des soupçons est classée à un degré très élevé sur l’échelle de riches terres à distribuer bientôt en catimini.
Résumons. Faisons une bruyante ovation à Bruno Gollnisch, le député européen qui vient d’expliquer que c’est grâce à la civilisation introduite en Algérie par son défunt oncle, député d’Alger durant la colonisation, que les Algériens procréèrent à tout va. Avant 1830, compte-t-il avec une jalouse précision, nous n’étions qu’un million d’Algériens ; à l’indépendance, nous étions dix millions ; aujourd’hui, nous sommes quarante millions d’âmes sur cette terre dont il dit que, de toutes les façons, elle n’était pas algérienne avant l’invasion française. Nous apprenons ainsi qu’une des missions civilisatrices de la colonisation fut de stimuler la libido de nos aïeux auxquels elle a permis de grossir nos rangs. A suivre la logique de ce nostalgique à l’absurdité fertile, si les Français n’avaient pas été défaits en 1962, ils auraient continué à enseigner le kamasoutra aux indigènes que nous étions et, à l’heure qu’il est, nous aurions frisé le milliard de yaouled et de Fatma.
M. Aït Amara
Comment (48)