Pour une criminalisation du négationnisme envers la Révolution algérienne
Par Youcef Benzatat – Suite à l’indignation unanime des Algériens provoquée par les propos odieux de l’Emirati Soltane Ben Mohammad Al-Kassimi, par lesquels il a tourné en dérision la Révolution algérienne, il est de bon droit d’adopter une loi criminalisant tout propos négationniste à son encontre. La réaction de l’opinion algérienne, qui a condamné à l’unanimité ces propos, plaide d’elle-même en faveur de la nécessité d’adopter une telle loi. En effet, ce vide juridique laisse la porte ouverte à toute personne malveillante ayant des comptes à régler avec l’Algérie d’abonder dans ce sens, en portant atteinte à la mémoire du sacrifice des martyrs et en blessant tout un peuple dont la plaie causée par la barbarie coloniale française demeure douloureusement béante. A cela s’ajoute la nécessité de préserver la Révolution de toute forme de perversion et de l’élever au statut d’exemplarité pour lui permettre de devenir un référent pour les générations à venir et pour toute l’humanité pour qu’aucun peuple ne soit plus tenté d’infliger à un autre peuple souverain la barbarie que le peuple algérien avait subie sous la domination du colonialisme français.
On n’a pas besoin de magistrats pour légiférer à ce propos, le peuple ayant tranché. D’ailleurs, c’est en partie à cause de ce vide juridique que l’acte négationniste d’Al-Kassimi est devenu possible. D’autant que les excuses qu’il avait formulées, suite à la tournure de l’évènement, sont venues aggraver encore un peu plus la désinvolture avec laquelle cet acte négationniste a été commis. Car il était convaincu qu’il n’encourait aucune sanction pénale, justement à cause de l’absence d’un cadre juridique pouvant incriminer de tels propos blessants.
C’est comme cela d’ailleurs que le négationnisme envers la barbarie nazie fut combattu, en ayant criminalisé tout acte ou parole négationniste envers la Shoah. De ce fait, il ne serait jamais venu à l’esprit d’Al-Kassimi de recourir avec autant de désinvolture à chercher un exemple sur la Shoah pour illustrer l’influence des ministres de la culture sur leurs présidents. La Révolution algérienne constituait pour lui une proie facile et sans garde-fou. Quelles que soient les motivations de ce passage à l’acte abominable, bien qu’il existe à coup sûr autant de motivations sournoises.
Mais la plus blessante est celle qui consiste à réduire la Révolution algérienne à une illustration, dans sa glorification de la puissance coloniale par l’évocation de De Gaulle en compagnie d’un grand homme de culture ! De Gaulle fut au pire «féroce», en aucun cas il fut un colonialiste, criminel de guerre. Il est féroce, mais aussi un grand nationaliste pour avoir grandement contribué à la libération de son pays du nazisme. Cette posture s’apparente au discours de la France officielle dominante et des pays de l’Otan. C’est un négationnisme diffus car leurs mentalités demeurent scrupuleusement non encore décolonisées. C’est une posture négationniste, et Al-Kassimi, en l’adoptant, s’était rendu coupable, lui aussi, de négationnisme envers la Révolution algérienne.
A cet effet, après avoir tourné à la dérision la résistance permanente du peuple algérien au colonialisme français durant 132 ans, avant d’arracher l’indépendance, qui s’est soldée par la mort cruelle de plusieurs millions de personnes et en ayant accordé à De Gaulle le privilège de la leur avoir accordée lui-même, charitablement, il fallait encore qu’il l’ait accordée plutôt à un tiers, en l’occurrence Gamal Abdenasser et les Arabes généralement pour gagner leur sympathie !
A la question si Al-Kassimi s’est-il rendu coupable de négationnisme envers la Révolution algérienne, la question fut largement débattue sur les réseaux sociaux algériens et dans la presse, et les conclusions ont plaidé à l’unanimité le négationnisme d’Al-Kassimi. L’indignation des Algériens fut aggravée encore plus du fait qu’Al-Kassimi est une personnalité politique et culturelle d’un pays avec lequel l’Algérie partage aussi bien l’histoire, la culture arabophone, la religion musulmane et appartient au même substrat civilisationnel arabo-islamique. Un pays frère comme il est admis dans l’imaginaire social, politique et historique des deux peuples algérien et émirati.
Il est inutile de dire que si cet acte est venu d’une personnalité de même rang que lui et d’un pays de l’Otan, l’opinion algérienne n’aurait jamais levé autant de boucliers avec une telle ampleur ! A considérer que l’Algérie continue toujours à résister au néocolonialisme et que celui-ci n’a pas définitivement tari. Son unité et sa souveraineté sont considérablement menacées et son effort de devenir une puissance régionale vivant en paix avec le monde constamment torpillé. Les Algériens sont conscients de cette menace et savent à quoi s’attendre de tels comportements vexants et les qualifient à leur juste place comme le produit de mentalités non encore décolonisées. Ces actes sont courants, et c’est de bonne guerre ! Cela n’empêche pas l’Algérie de continuer à forger son rôle de grande puissance régionale dans l’humilité.
On a eu le droit à un bras d’honneur plus odieux encore que le dérapage mystérieux d’Al-Kassimi. Mais avec cette loi, criminalisant tout acte négationniste, Longuet, l’auteur de ce bras d’honneur, aurait des comptes à rendre à la justice algérienne lorsque l’occasion se présentera. De même pour Al-Kassimi, qui aurait choisi d’illustrer l’influence des ministres de la Culture sur leurs présidents par l’intrusion grossière et insolente dans le souvenir de la douleur d’un peuple, du mépris de la tragédie de son histoire et la profanation de la mémoire de ses martyrs.
Y. B.
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