Humilié à Cuba et aux Etats-Unis : Mohammed VI cherche le réconfort à Paris
Mohammed VI – qui se trouve toujours en Floride, où il continue à espérer d’être reçu par Donald Trump, le nouveau locataire de la Maison-Blanche – vient de recevoir une réponse favorable à sa demande d’audience par l’Elysée pour vendredi prochain. Des sources diplomatiques françaises reprises par la presse marocaine évoquent un déjeuner en tête à tête au cours duquel les deux chefs d’Etat feront «un tour d’horizon des relations franco-marocaines à la veille du départ de François Hollande de l’Elysée».
En réalité, ce rendez-vous que Mohammed VI mettra certainement à profit pour faire oublier ses déboires à Cuba et à Miami ne compte qu’un seul grand point dans son ordre du jour. Selon certaines indiscrétions, il ne sera question que du conflit du Sahara Occidental, dossier sur lequel aura à se pencher le Conseil de sécurité de l’ONU à la fin du mois. Et comme ce fut le cas depuis près d’un demi-siècle, François Hollande, dont le pays soutient la colonisation du Sahara Occidental par le Maroc et est membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU, rassurera Mohammed VI concernant ses intentions.
Le chef de l’Etat français fera comprendre à son hôte que la France veillera, comme toujours, à ce que la résolution qu’aura à adopter le Conseil de sécurité ne soit pas défavorable à son ancien protectorat, surtout qu’il est question cette fois d’une relance des négociations directes entre le Maroc et le Front Polisario. En contrepartie, Mohammed VI cédera certainement de nouvelles «actions» de son pays. La rencontre du 28 avril prochain sera donc une réunion de coordination destinée à faire en sorte à ce que la prochaine résolution sur le Sahara Occidental ne réserve pas de «mauvaises» surprises aux Marocains et aux Français qui comptent de gros intérêts économiques au Maroc et dans les territoires sahraouis occupés.
Le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a présenté le 10 avril dernier son rapport sur le conflit du Sahara Occidental aux membres du Conseil de sécurité. Il y recommande notamment la prolongation du mandat de la Minurso d’un an. A l’occasion, le successeur de Ban Ki-moon a affirmé son intention de «relancer le processus de négociation avec une nouvelle dynamique». «Le conflit du Sahara doit se terminer pour permettre à la région de relever les défis sécuritaires, économiques et humains qui la guettent», a-t-il souligné dans son rapport.
Comme son prédécesseur, le nouveau Secrétaire général de l’ONU a appelé à «une solution politique mutuellement acceptable», tout en laissant entendre qu’il fera quelques contorsions à la notion d’autodétermination. La nouveauté est que Guterres a estimé également que les pays voisins «devraient» participer à cette solution, citant nommément l’Algérie et la Mauritanie, ce qui n’a pas plu à Alger. Il a également mis la pression sur le Front Polisario, en appelant le Conseil de sécurité à intervenir pour exhorter les troupes sahraouies à se retirer «entièrement» et «sans conditions» de Guergarate, une région qu’avait illégalement occupée l’année dernière l’armée marocaine sous le prétexte fallacieux qu’elle allait construire une route et faire la guerre aux contrebandiers. Or, les seuls à fréquenter la région sont les commerçants marocains qui se rendent en Mauritanie et en Afrique de l’Ouest.
Sur la question des droits de l’Homme, il y a eu, par contre, quelques changements. Le Secrétaire général de l’ONU a appelé à la mise en place d’un monitoring «indépendant, impartial et exhaustif» dans le but d’assurer la protection des habitants du Sahara Occidental occupé illégalement par le Maroc. Cette recommandation n’introduit cependant aucun changement sur le mandat de la Minurso, comme avait failli l’obtenir l’ancienne ambassadrice américaine Susan Rice en 2013. Cette année-là, la France avait réussi à faire échouer le projet de la diplomate américaine, qui voulait que le mandat de la force onusienne soit élargi à la surveillance de la question des droits de l’Homme. La grande crainte du Maroc est que le scénario se répète avec la nouvelle Administration américaine.
Khider Cherif
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