La crise systémique du capitalisme
Par Mesloub Khider – Que la théorie marxiste ait été haïe, vilipendée, moquée, déclarée mille fois morte par la pensée bourgeoise, ses professeurs, ses prix Nobel, ses politiciens, ses journalistes (je peux rajouter Nacer Chali) n’est que parfaitement normal.
Que la théorie marxiste ait été avilie, trahie, déformée, détournée par les courants réformistes, révisionnistes, staliniens, gauchistes, cela fait partie aussi des phénomènes inévitables du cours historique de la lutte des classes et de la vie du prolétariat.
Aujourd’hui, la crise systémique du mode de production capitaliste vient nous rappeler combien toutes les théories économiques bourgeoises (désignées sous le titre pompeux de «sciences économiques») forgées depuis deux siècles n’ont jamais pu épargner la récurrence des récessions et des crises profondes. En effet, le capitalisme n’a jamais connu une période de prospérité permanente. Du reste, depuis plus d’un siècle, le capitalisme fonctionne sur le mode triptyque : crise-guerre-reconstruction.
Au cours du XXe siècle, à deux reprises, pour résoudre à sa manière impérialiste les crises économiques, il a provoqué deux boucheries mondiales. Avec comme conséquences, les destructions gigantesques de milliards d’infrastructures et le massacre de millions de prolétaires (20 millions au cours de la première et 60 millions au cours de la seconde).
Après une période de moins de 30 ans de reconstruction (les fameuses trente glorieuses ainsi nommées par les économistes bourgeois, mais permises grâce à une exploitation féroce des rares forces productives survivantes européennes et immigrées), le capitalisme est de nouveau entré en crise depuis le début des années soixante-dix. Et toutes les solutions réformistes, ya si Nacer Chali, tentées pour juguler ou inverser la tendance n’ont pas freiné l’accélération et l’approfondissement de la crise. Avec son lot de fermetures d’entreprises et le licenciement de millions de salariés.
Sans rentrer dans une analyse marxiste détaillée de l’origine de la crise, il n’est pas inutile de rappeler quelques fondements explicatifs de cette crise.
Le mode de production capitaliste repose sur l’extraction de la plus-value arrachée aux travailleurs, principale source d’accumulation. Mais sous l’effet conjugué de l’augmentation du capital constant de plus en plus performant et de la concurrence exacerbée, le profit moyen ne cesse de baisser.
Enfin, le capitalisme porte en lui, depuis toujours, une sorte de maladie congénitale : il produit une toxine en abondance que son organisme n’arrive pas à éliminer, la surproduction. Il fabrique plus de marchandises que son marché ne peut en absorber.
Pour accumuler, se développer, le capital doit donc trouver des acheteurs autres que les ouvriers et les capitalistes. Autrement dit, il doit impérativement trouver des débouchés en-dehors de son système, sous peine de se retrouver avec des marchandises invendables sur les bras et qui viennent engorger le marché : c’est alors la «crise de surproduction» !
Et pour pallier l’absence de solvabilité limitée par nature, le capitalisme s’est lancé depuis 40 ans dans une fuite en avant par le recours au crédit. Se traduisant par l’endettement colossal des ménages et des Etats.
Pour prendre une image, la dette est au capitalisme ce que la morphine est au malade condamné. En y recourant, le souffrant surpasse momentanément ses crises, se calme et s’apaise. Mais peu à peu, la dépendance à ces doses quotidiennes augmente. Le produit, dans un premier temps salvateur, devient à son tour nocif… jusqu’à l’overdose !
Baisse tendancielle du taux de profit, surproduction, endettement abyssal, guerre économique entre les multiples capitalistes, chômage endémique, guerres impérialistes : jamais le capitalisme n’a vécu une crise aussi grave depuis la fin de la seconde guerre.
«Une épidémie qui, à toute autre époque, eût semblé une absurdité, s’abat sur la société – l’épidémie de la surproduction. La société se trouve subitement ramenée à un état de barbarie momentanée ; on dirait qu’une famine, une guerre d’extermination lui ont coupé tous ses moyens de subsistance ; l’industrie et le commerce semblent anéantis. Et pourquoi ? Parce que la société a trop de civilisation, trop de moyens de subsistance, trop d’industrie, trop de commerce.» (Karl Marx).
Notre époque a ainsi ouvert un nouveau chapitre au sein de l’histoire de la décadence du capitalisme, qui a débuté en 1914 avec la Première Guerre mondiale. La capacité de la bourgeoisie à ralentir le développement de la crise par un recours de plus en plus massif au crédit a pris fin. Dorénavant, les secousses vont se succéder sans qu’il n’y ait entre elles ni répit ni véritable relance.
La bourgeoisie sera incapable de trouver une solution réelle et durable à cette crise, non pas parce qu’elle serait devenue soudainement incompétente, mais parce que c’est un problème qui n’a pas de solution. La crise du capitalisme ne peut pas être résolue par le capitalisme. Car, comme nous venons d’essayer de le démontrer, le problème, c’est le capitalisme, le système capitaliste comme un tout.
Et ce système est aujourd’hui en faillite. Enfin, le capitalisme n’hésitera pas à se lancer dans une troisième guerre mondiale si les prolétaires ne se décident pas à se lancer à l’assaut pour abattre ce système. Pour instaurer une communauté humaine universelle débarrassée de la marchandise, du salariat, de l’argent, de l’Etat, des frontières…
M. K.
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