Le danger marocain
Par Sadek Sahraoui – Le grotesque cinéma provoqué la semaine dernière par la délégation marocaine dans les Caraïbes risque de se reproduire, à moyen terme, partout ailleurs dans le monde. Confronté depuis plusieurs mois à un mouvement de protestation d’une ampleur inégalée, le Maroc cherchera encore, en effet, à multiplier les provocations contre l’Algérie pour faire diversion sur ses problèmes internes et amener, par la même occasion, les Marocains à oublier leurs colères. Le Makhzen ne paraît avoir d’autre choix que de s’inventer un ennemi extérieur du moment qu’il n’a pas les moyens d’acheter la paix sociale.
A l’inverse de l’image d’un pays prospère socialement et économiquement qu’il essaye de vendre aux Occidentaux avec la complicité d’une bonne partie de la presse française, le Maroc n’est pas loin du dépôt de bilan. Quasiment tous ses indicateurs économiques et sociaux sont dans le rouge. Le pays croule sous une importante dette extérieure publique qui dépasse les 30 milliards de dollars et enregistre un déficit commercial abyssal.
La situation est tellement dangereuse que la Banque mondiale vient, d’ailleurs, de tirer la sonnette d’alarme et avertit que le Maroc n’est pas loin d’une explosion sociale généralisée. L’institution financière a révélé, en effet, que ce pays «ne peut pas se contenter de poursuivre ou d’approfondir les politiques sectorielles volontaristes actuelles», politiques qui n’ont pu ni éradiquer le chômage ni mettre fin à la faible productivité de l’économie.
En plus de chercher à provoquer une nouvelle escalade avec l’Algérie pour détourner l’attention de son opinion sur la faillite de sa gestion et la corruption qui gangrène son royaume, Mohammed VI montre qu’il est également prêt à plonger la région berbérophone du Rif dans un bain de sang. Dans le courant de la journée d’hier, il a donné ordre à des unités de l’armée d’encercler la ville frondeuse d’El-Hoceima et de mater la population dont le seul tord est de réclamer son identité et une meilleure prise en charge. Mohammed VI abhorre particulièrement les Rifains, car ils lui rappellent régulièrement avec fracas que son trône est fondé sur la grande imposture de l’histoire contemporaine du Maroc. Depuis la guerre des sables, la paix dans la région n’a sans doute jamais été aussi menacée.
S. S.
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