Financement du terrorisme : Theresa May cherche-t-elle à couvrir l’Arabie Saoudite ?
Le gouvernement de Theresa May pourrait bien ne jamais rendre publique une enquête sur le financement et le soutien aux groupes terroristes commandée par David Cameron, son prédécesseur. La raison ? Cette enquête, qui se concentre particulièrement sur le rôle de l’Arabie Saoudite, parvient à des conclusions qui confirmeraient l’implication de Riyad dans l’explosion de violence terroriste que connaissent le Moyen-Orient et l’Europe. L’enquête avait été lancée dans le cadre d’un accord avec les démocrates libéraux en échange de leur soutien aux raids aériens britanniques contre Daech en Syrie, en décembre 2015.
La presse britannique révèle que Tom Brake, le porte-parole des affaires étrangères des démocrates libéraux, a écrit au Premier ministre pour lui demander de confirmer que l’enquête ne sera pas enterrée. Il a pris cette initiative après la confirmation par le ministère britannique des Affaires étrangères que le rapport en question n’avait pas encore été complété et déclaré qu’il ne serait pas nécessairement publié, en qualifiant son contenu de «très sensible».
Brake écrit dans sa lettre à Theresa May : «En tant que ministre de l’Intérieur à l’époque, votre ministère était particulièrement impliqué dans la rédaction du rapport. Dix-huit mois plus tard, et à la suite de deux horribles attentats terroristes commis par des citoyens nés au Royaume-Uni, ce rapport n’est toujours pas achevé et publié. Ce n’est pas un secret que l’Arabie Saoudite, en particulier, fournit des fonds à des centaines de mosquées au Royaume-Uni qui adoptent une interprétation wahhabite très dure de l’islam. C’est souvent dans ces institutions que l’extrémisme britannique prend racine», souligne-t-il.
Le contenu du rapport pourrait s’avérer sensible aussi bien sur le plan politique que juridique. L’Arabie Saoudite, qui a été une source de financement pour les prédicateurs et les mosquées islamistes fondamentalistes, est considérée comme un allié par Londres. Theresa May a, d’ailleurs, effectué une visite à Riyad aussitôt arrivée au pouvoir. En décembre dernier, un rapport des services de renseignement allemands avait accusé plusieurs organisations du Golfe de financer des écoles religieuses et des prédicateurs salafistes radicaux dans les mosquées, qualifiant cela de «stratégie d’influence à long terme».
Le chef des démocrates libéraux, Tim Farron, a déclaré qu’il estimait que «le gouvernement n’avait pas respecté l’accord conclu avant le vote sur les attaques aériennes». Le rapport doit être publié lorsqu’il sera complété, a-t-il insisté, bien que le ministère des Affaires étrangères ait fait savoir que les informations contenues dans le document étaient sensibles. «Cette approche à courte vue doit changer. Il est essentiel que ces points de vue extrêmes et radicaux soient confrontés et que ceux qui les financent soient interpellés publiquement», a-t-il déclaré. «Si les conservateurs sont sérieux pour arrêter le terrorisme chez nous, ils doivent cesser de tergiverser et rouvrir les enquêtes sur le financement étranger de l’extrémisme violent au Royaume-Uni», a encore souligné Tim Farron.
Sadek Sahraoui
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