Comment Doha et Riyad retardent le règlement de la crise libyenne
Par Sadek Sahraoui – Complices hier de l’assassinat par l’Otan de Mouammar Kadhafi, les monarchies du Golfe continuent de souffler aujourd’hui sur les braises rougeoyantes de la crise libyenne, faisant ainsi durer le drame des Libyens. Malgré le conflit qui l’oppose à ses voisins depuis la fin du mois de juin dernier, le Qatar reste actif dans l’ex-Jamahiriya où il finance de nombreuses milices. C’est le cas des puissantes milices de Misrata dont les chefs reviennent d’ailleurs d’un voyage tous frais payés à Doha.
Bien évidemment, aucune des deux parties n’a jugé utile d’informer de ce déplacement l’Etat libyen qu’incarne le gouvernement d’union nationale (GNA) ce qui a d’ailleurs fait entrer Fayez Al-Sarraj dans une colère noire. Une colère qu’il a pris soin de traduire par écrit dans un communiqué rendu public mercredi soir. Contre toute attente, ce ne sont pas les médias libyens qui ont répercuté les premiers le communiqué de presse du chef du GNA, mais la presse saoudienne.
Le site internet de la chaîne de télévision Al-Arabiya – connue pour rouler pour la monarchie wahhabite – a consacré un long papier à la colère de Fayez Al-Sarraj contre certains de «ses» officiers supérieurs et au «jeu trouble du Qatar en Libye». La célérité avec laquelle cette chaîne, créée à l’origine pour concurrencer à Al Jazeera, a réagi à l’information confirme une nouvelle fois l’existence, concernant le dossier libyen, d’une forte rivalité entre l’Arabie Saoudite et le Qatar. Il est aujourd’hui connu que les deux pays soutiennent des camps rivaux.
Le Qatar et la Turquie financent et arment les milices de l’ouest du pays alors que les Emirats et l’Arabie Saoudite sont plutôt dans le camp du général Khalifa Haftar, qui fait actuellement de la lutte contre les Frères musulmans sont cheval de bataille. Dans sa guerre contre les milices de Misrata par exemple, le maréchal Haftar n’hésite cependant pas à contracter des alliances avec des salafistes de Benghazi.
Ce sont ces ingérences étrangères répétées qui compliquent d’ailleurs le règlement de la crise libyenne et anéantissent, par exemple, les efforts que fournit régulièrement l’Algérie pour réconcilier Les libyens entre eux.
Et il n’y a pas que les pays arabes et les occidentaux qui s’ingèrent dans la crise libyenne. Bien décidé à prendre le pouvoir par n’importe quel moyen, l’ancien officier supérieur de l’armée de Mouammar Kadhafi accepte même de se faire aider par Tel-Aviv. Le site d’information Middle East Eye (MEE) a fait part récemment à ce propos de l’existence d’une coopération entre le commandant de l’armée nationale libyenne et Israël. «Il y a une coopération et une coordination entre le général libyen Khalifa Haftar et le régime israélien», écrit Middle East Eye. Selon la même source, le maréchal Haftar a eu des rencontres avec les autorités israéliennes sous l’égide des Emirats arabes unis. Les forces de Haftar ont également reçu des aides militaires de la part de Tel-Aviv, ajoute MEE, citant des sources israéliennes bien informées qui ont requis l’anonymat. Il est établi que l’armée israélienne avait bombardé le 25 août 2015 les positions de Daech sur la ville côtière libyenne de Syrte. Cette attaque avait eu lieu avec à la demande de Khalifa Haftar, qui avait rencontré secrètement en Jordanie des autorités israéliennes. Le quotidien koweïtien Al-Jarida avait donné les détails de cette rencontre dans un article publié le 5 août 2015. A en croire certaines informations, Khalifa Haftar a promis de conclure avec les autorités israéliennes des contrats pétroliers et de vente d’armes en échange de toute attaque israélienne contre les positions de Daech à Syrte.
S. S.
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