La DGED espionnait nos diplomates avec la complicité d’agents français
Par Houari A. – L’information donnée par le journal Libération à propos des agissements de la DGED (Direction générale des études et de la documentation) marocaine, qui espionne de hauts responsables algériens en France, est bien plus grave que ce que montrent les faits relatés. Cette information révèle, en fait, que la communauté marocaine en France est mobilisée au service des renseignements marocains. Ainsi, les diplomates algériens sont pistés dans les aéroports qui sont devenus des nids d’indicateurs des services marocains de même, sans doute, que d’autres institutions comme l’Institut du monde arabe.
L’article publié par Libération ne dit pas tout et ne montre que la face visible des activités des Services marocains en France, c’est-à-dire celle qui implique directement des agents français. Il apparaît clairement dans cet écrit article que ce scandale touche particulièrement les Algériens, plus spécialement les hauts responsables de passage en France.
Sous couvert de lutte contre le terrorisme et de coopération sécuritaire entre les services marocains et des agents français, un capitaine de la police française, qui dirigeait depuis septembre 2014 l’«unité d’information» de la police aux frontières (PAF) de l’aéroport parisien d’Orly, a remis à un agent du renseignement marocain, par l’intermédiaire du directeur d’une société de sûreté travaillant à l’aéroport d’Orly (lui aussi Marocain, établi en France) «des documents de la PAF sur le passage de frontière d’un ancien haut responsable algérien», ainsi que deux notes de l’ambassade d’Algérie à propos des passages de deux ministres algériens.
Un agent du renseignement marocain est au centre de cette affaire d’espionnage ciblant les diplomates et hauts responsables algériens qui séjournent en France. C’est lui qui reçoit les rapports les concernant, établis par le capitaine de la police française et remis au Marocain, directeur de la société de sûreté, qui les lui transmet. D’après un premier scénario établi par la justice française, qui travaille depuis un peu plus d’un an sur l’affaire précise Libération, «le fonctionnaire de la police aux frontières d’Orly, retourné par les services secrets marocains, leur transmettait des informations ultrasensibles en échange de voyages tous frais payés».
Cette affaire, qui a pour théâtre l’aéroport d’Orly – où arrivent les vols qui viennent d’Algérie, donc un lieu de passage d’officiels algériens – et qui implique des fonctionnaires français et des ressortissants marocains complices dans une collecte de renseignements destinés à être utilisés contre les intérêts de notre pays, est-elle la seule du genre ? Il y en a sûrement d’autres qui ont lieu dans d’autres cadres investis par des agents recrutés dans la communauté marocaine par les services du Makhzen et mis en contact avec des agents français corrompus.
La DGED ne lésine pas sur les moyens pour se payer les services de fonctionnaires français mis à contribution dans des activités nuisibles à l’Algérie.
Dans l’affaire relatée par Libération, le capitaine de la police française et sa famille ont été invités au Maroc «aux frais de la princesse… à trois reprises pour des voyages d’une petite semaine, en août 2015 et 2016 ainsi qu’en avril 2017. Billets d’avion, hôtels quatre étoiles, tout était réglé pour le fonctionnaire et les siens». Il a bénéficié de ces largesses contre des informations extraites de fichiers de police. Les enquêteurs ont isolé «quelque 10 000 euros déposés en espèces sur son compte en 2015, dont l’origine est inconnue. Les dépôts diminuent les années suivantes, à mesure que les voyages se multiplient». L’intermédiaire est un Marocain installé en France.
H. A.
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