Faux vrais dinars
Par Sadek Sahraoui – Le Premier ministre Ahmed Ouyahia présentera, ce dimanche, devant l’Assemblée populaire nationale (APN), le plan d’action de son gouvernement. Conçu de telle sorte à faire traverser au pays la crise sans trop de dommages, ce plan n’apporte en réalité qu’une seule grande nouveauté : il préconise de recourir sans plus attendre au financement non conventionnel pour éviter à l’Etat et à l’économie algériens l’asphyxie financière ou carrément la faillite.
Pour ce faire, un projet de loi portant amendement de la loi sur la monnaie et le crédit a déjà été adopté «pour introduire le financement non conventionnel au profit du Trésor public». La Banque d’Algérie est désormais prête techniquement et légalement «à prêter directement au Trésor public afin de permettre à ce dernier de financer les déficits du budget de l’Etat, de financer la dette publique interne et d’allouer des ressources au Fonds national de l’investissement». Avec cette réforme, la Banque d’Algérie va donc financer directement le Trésor public par le biais du procédé de création monétaire, communément appelé la planche à billets.
Ahmed Ouyahia avait bien évidemment le choix entre de nombreuses autres mesures pour circonscrire les effets de la crise causée par l’effondrement des prix du brut. Des mesures qui, en plus, auraient donné des résultats garantis. Il aurait pu, par exemple, instaurer de nouveaux impôts, déclarer la guerre aux tenants de l’économie l’informel, mettre la pression sur les contribuables indélicats et pourquoi pas même entreprendre de revoir de fond en comble notre politique en matière de soutien des prix. Cela aurait certainement permis au pays de se relever sans trop avoir à jouer avec le feu de la planche à billets.
Mais voilà, le gouvernement semble avoir eu le souci constant, quand il a eu à choisir une thérapie, d’agir de telle sorte à ce que le front social et la sphère économique restent calmes. Il est vrai que l’imposition de plus d’impôts, la mise en œuvre de réformes économiques de fond ou l’ouverture d’un front avec les barons de l’économie informelle auraient certainement fait entrer le pays dans une zone de turbulences de laquelle personne ne sait dans quel état il pourrait en sortir.
Selon toute vraisemblance, les décideurs n’ont voulu prendre aucun risque, surtout que des acteurs politiques locaux tentent actuellement de créer un contexte favorable à une présidentielle anticipée. Des gens à l’image de Noureddine Boukrouh ou de Soufiane Djilali veulent en effet absolument hâter la succession du président Bouteflika. Contrairement donc à ce que pensent beaucoup de gens, le programme du nouveau gouvernement est avant tout une réponse politique aux détracteurs du «pouvoir». Il n’est pas du tout encore question d’économie.
S. S.
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