Les saltimbanques du Makhzen sont de retour sur la place de Bruxelles
Par Karim B. – Le Makhzen ne digère visiblement pas encore son échec cuisant suite à la relabellisation du prochain Sommet UE-Afrique prévu à Abidjan les 29-30 novembre prochains, qui devient le Sommet Union africaine-Union européenne, garantissant ainsi la participation de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) à cet important événement. Ainsi, pour masquer cet énième revers, il a organisé au siège du Parlement européen à Bruxelles, les 23 et 24 novembre, via l’une de ses organisations satellites de création récente, en l’occurrence l’Organisation internationale des médias africains (OIMA), appellation à la fois pompeuse et trompeuse, présidée par la lobbyiste marocaine Kaoutar Fal, un forum sous le thème «Listen to Africa», visant en apparence à se pencher sur les défis auxquels est conforté le continent africain et à célébrer la Journée des médias africains mais dont l’objectif principal, assumé d’ailleurs, est de promouvoir les thèses colonialistes marocaines, en mettant «à l’honneur la région de Dakhla-Oued Eddahab au Sahara Occidental occupé afin de la présenter comme un modèle de développement réussi».
Cet «événement» est «parrainé», comme à l’accoutumée, par l’homme de main du Makhzen au sein de l’hémicycle européen, l’eurodéputé socialiste français pour la région lilloise, Gilles Pargneaux. Ce dernier n’hésite pas, comme à chaque fois, à instrumentaliser même son propre groupe politique au sein du Parlement européen (les socialistes et démocrates), en l’affichant faussement sur la fiche de présentation de cette rencontre comme l’un des parrains de cette rencontre, sans succès. Il faut dire que Gilles Pargneaux redouble de signes d’allégeance à Rabat dont il escompte un renvoi d’ascenseur et un appui auprès de Paris pour rempiler pour un troisième mandat lors des prochaines élections législatives européennes prévues en mai 2019, qu’illustre clairement son récent repositionnement opportuniste, en se démarquant de la patronne de la Mairie de Lille et ténor du parti socialiste, Martine Aubry, dont il était la créature, et en affichant ostensiblement sa proximité avec le président français, Emmanuel Macron. Cette girouette, qui veut encore profiter des largesses du Makhzen au cours d’un hypothétique troisième mandat européen a compris que l’implosion du PS et l’institution de listes nationales pour les prochaines élections européennes, a décidé de passer avec armes et bagages chez les macroniens en bavant au passage sur celle qui a fait toute sa carrière dans la fédération PS du Nord.
Du cinéma au Parlement européen
Il est à relever que ce dernier est un habitué de l’organisation de rencontres foireuses à la gloire du Makhzen, preuve en est qu’aucun autre eurodéputé, excepté sa propre personne, n’a daigné prendre part à cet énième flop, y compris parmi ses pairs qui naviguent habituellement dans le giron de Rabat. Une réunion sans intérêt ni impact puisqu’il s’agit d’une autre rencontre de propagande et d’autocongratulation, au regard de la qualité des intervenants dont la plupart sont originaires de pays africains et du Moyen-Orient notamment, connus pour leur alignement total sur les thèses annexionnistes marocaines. Les organisateurs ont même fait intervenir, sans lien aucun avec «le sujet du jour», un rabbin pour faire l’éloge des conditions de vie de la communauté juive au Maroc… Décryptage : «Le Maroc, terre de tolérance, est le paradis sur terre, l’Andalousie des temps modernes.» Pendant ce temps-là, des Rifains croupissent en prison, des marocains périssent tragiquement dans une bousculade de distribution d’aide alimentaire et d’autres malheureuses femmes laissent chaque jour une partie de leur dignité, en les laissant travailler comme des «femmes-mulets» entre l’enclave espagnole de Ceuta et leur pays.
Il est à relever également que le timing calculé de cette rencontre a «coïncidé» avec la semaine dédiée à l’Afrique au sein du Parlement européen en amont du 5e Sommet Union africaine-Union européenne, et intervient au lendemain de l’organisation d’une conférence de haut niveau, le 22 novembre 2017, sous le thème «Vers un partenariat renouvelé avec l’Afrique», marquée par la participation des plus hauts responsables européens et de la Commission de l’Union africaine. Ainsi, afin de parasiter cette Conférence de haut niveau mais surtout de faire oublier sa défaite concernant le prochain Sommet UA-UE, Rabat a fait également dépêcher au Parlement européen à Bruxelles une délégation parlementaire composée d’élues femmes dans le but de relayer ses thèses expansionnistes et «vendre» l’image d’un royaume respectueux des droits des femmes. Peine perdue tant le bilan en la matière est des plus sombres et qui ne trompe plus personne, surtout pas au sein des institutions de l’UE très à cheval sur ces questions en particulier.
En parallèle, le Makhzen s’active également sur la place bruxelloise pour diffuser sa propagande. Dernier acte en date, la projection au Parlement fédéral belge, hier le 23 novembre du «film-documentaire» intitulé Sahel & Sahara Connexions, coréalisé par le Marocain Hassan El-Bouharrouti, et l’élue belgo-marocaine Latifa Aït Baala dont l’objectif est de faire le parallèle éhonté entre le mouvement de libération, le Front Polisario et des organisations terroristes qui pullulent dans la région du Sahel. La diffusion de ce documentaire de propagande devant une assistance composée, quasi exclusivement, de membres de la communauté marocaine établie en Belgique et des membres de la société civile belge originaires du Maroc, a été parrainée cette fois-ci par un autre inféodé de Rabat, qui n’était même pas présent lors de cette projection, en l’occurrence Bertin Mampaka, sénateur belge d’origine congolaise, un nostalgique de l’ère «Mobutu» qui a régné d’une main de fer pendant de longues années sur l’ex-Zaïre, pour finir ses jours en exil au Maroc.
Il convient de rappeler que ce même «film-documentaire» a été projeté en avril dernier au Parlement européen, suivi d’un débat animé par l’eurodéputé, ex-membre du Front National, Aymeric Chauprade, xénophobe et nostalgique de l’Algérie française, projection durant laquelle aucun autre député parmi les 751 que compte l’institution européenne n’a daigné faire le déplacement. Cette projection avait même fait l’objet d’une remise à l’ordre de le part du président du Parlement européen, qui a été interpelé sur cette projection dans l’enceinte du Parlement, en indiquant que «de tels événements, même s’ils se déroulent dans les locaux du Parlement, ne représentent pas la position officielle du Parlement qui s’exprime par ses résolutions plénières ou par l’intermédiaire de ses organes parlementaires officiels respectifs» (voir AP du 2 et 27 avril 2017).
A vrai dire, le recours à des lobbyistes grassement rémunérés, et que tout le monde connaît pour répandre ses thèses fallacieuses au sein des institutions européennes est monnaie courante chez le Makhzen, à l’image de Jean-Paul Carteron, président du «Cercles des ambassadeurs à Paris» et du Forum Crans Montana, Latifa Aït Baala, élue belge d’origine marocaine et présidente de l’Institut libéral de formation et d’animation culturelles (IFLAC) sis à Bruxelles, Bruno Dethomas, ancien chef de la délégation de l’UE à Rabat, reconverti en conseiller au sein du cabinet de lobbying GPlus, la journaliste franco-libanaise Zeina El-Tibi , présidente de l’Observatoire des études géopolitiques (OEG) basé à Paris ou encore le Cercle Eugène-Delacroix (CED), lobby d’élus français d’origine marocaine. Cet exemple, qui n’est qu’un échantillon d’hommes et de femmes au service du Makhzen et de ses thèses mensongères, ne peut heureusement rien, avec tous les moyens déployés, face à la justesse de la cause sahraouie, telle que affirmée sans ambigüité par le droit et la légalité internationales.
K. B.
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