Massacre du Sinaï : stratégie de la terreur ou implantation de Daech ?
Par R. Mahmoudi – L’effroyable attentat commis vendredi dans le désert égyptien du Sinaï marque certainement un tournant dans la stratégie de la terreur mise en œuvre par Daech à travers ses innombrables filiales dans les pays de la région. Il reste à savoir si cette idée de pousser la violence à son paroxysme, en faisant le plus grand nombre de victimes possible, relève seulement de la nature nihiliste de cette organisation pour prouver qu’elle est toujours capable du pire ou alors d’une tactique de guerre visant à occuper un nouvel espace, le Sinaï, pour y ériger son «émirat», après avoir été délogée de ses deux «capitales» irakienne et syriennes : Mossoul et Reqqa.
Vu la concentration d’islamistes, et surtout de Frères musulmans, dans cette région – comme on a pu le vérifier sur les premières images de ce massacre montrant des nervis islamistes presque manifester contre l’armée égyptienne en scandant des slogans hostiles – et vu aussi la particularité géopolitique de cette région qui, jadis, fut une sorte de zone-tampon entre l’Egypte et Israël, et vers laquelle Tel-Aviv rêve aujourd’hui de déplacer la population de Gaza –, cette irruption paraît bien planifiée.
C’est dire que l’implantation de Daech au Sinaï va encore compliquer la situation, y compris pour les Palestiniens qui risquent d’en subir les contrecoups. D’abord par rapport au point de passage de Rafah, unique accès terrestre à la bande de Gaza, qui sera encore plus verrouillé par les autorités égyptiennes après ce massacre mais, aussi, du fait que la montée terroriste dans cette région limitrophe peut accentuer l’amalgame qui est déjà entretenu par Tel-Aviv et ses alliés occidentaux, et depuis peu par la coalition arabe menée par Riyad, et dont fait partie Le Caire, entre la résistance et le terrorisme. Cette coalition n’a-t-elle pas classé Hamas comme «organisation terroriste» ?
Coïncidant avec les tractations de moins en moins secrètes engagées par les Al-Saoud avec les Israéliens pour aboutir rapidement à une forme de normalisation des relations entre les deux pays, alors que s’opère un virage à 180° en Arabie Saoudite, le massacre de vendredi au Sinaï est susceptible d’accélérer le processus.
R. M.
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