Le directeur du Musée de Paris : «L’Algérie n’a pas demandé les crânes»
Par Houari Achouri – Le dossier des crânes de résistants algériens détenus au Musée de l’Homme de Paris connaît un rebondissement après la déclaration du directeur général délégué de cet établissement, Pierre Dubreuil, qui a été interrogé par le quotidien En Nahar. C’est à l’Etat algérien, dit-il, de demander à l’Etat français officiellement la restitution de ces crânes. Il affirme n’avoir reçu aucune demande dans ce sens. Ce responsable fait savoir que ces restes de chouhada algériens sont actuellement une propriété publique du peuple et de l’Etat français.
Il estime, par ailleurs, que l’opération de restitution est complexe et exige le changement de statut légal des crânes pour transférer leur propriété vers l’Etat algérien. Il y a une coopération algéro-française, ajoute-t-il, pour l’identification des crânes des martyrs de la bataille des Zaâtcha et déclare que le Musée de l’Homme de Paris est disponible à offrir toutes les facilités pour réaliser cette opération, dans le cas, insiste-t-il, où il reçoit une demande officielle de l’Etat algérien.
Le dossier des crânes de résistants algériens est un des éléments constitutifs de la question mémorielle en suspens entre la France et l’Algérie. On sait que le président français, Emmanuel Macron, lors de sa récente et brève visite à Alger, a fait part de l’accord favorable de l’Etat français pour restituer à l’Algérie les crânes des 36 résistants algériens.
C’est en mai 2011 que l’archéologue et historien Ali-Farid Belkadi a lancé une pétition pour le rapatriement des restes mortuaires conservés dans les musées français, en particulier les crânes de résistants algériens tués par le corps expéditionnaire français dans les années 1840 et 1850, qu’il venait de retrouver dans les réserves du Musée de l’Homme à Paris.
Plus tard, un groupe de ressortissants algériens a pris l’initiative de fonder une association appelé Anti-crime international ayant pour objectif le rapatriement des ossements des valeureux combattants algériens de la révolte des Zaâtcha de 1849. Cette association a inscrit dans son programme une action devant les juridictions internationales pour réclamer le rapatriement des crânes vers l’Algérie, au motif que leur séquestration dans un établissement français, où ils sont exposés au public, est «un crime de guerre».
Les historiens français rappellent que lors de la bataille des Zaâtcha en 1849, les résistants algériens ont été décapités et «leurs têtes, au bout de piques, furent emmenées jusqu’à Biskra et exposées sur la place du marché, afin d’augmenter l’effroi de la population». Les têtes détachées des corps furent transférées en France pour être d’abord exposées à la Société d’anthropologie de Paris, puis transférées au Musée de l’Homme, où elles se trouvent encore aujourd’hui.
Un collectif d’intellectuels établis en France, composé d’historiens, d’universitaires, d’éditeurs et de sociologues, a appelé à rapatrier ces dépouilles en Algérie pour leur donner une sépulture digne et contribuer ainsi à «sortir de l’oubli l’une des pages sombres de l’histoire de France».
H. A.
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