L’armée syrienne repousse une attaque turque : Erdogan tente le diable
Par Sadek Sahraoui – Alors que se tient, ce mardi 30 janvier, le Congrès du dialogue national syrien convoqué par les Russes à Sotchi, les espoirs de «percée politique» sont faibles. L’opposition et les Kurdes ont boycotté la réunion, tandis que les combats s’intensifient à travers la Syrie et que la Turquie poursuit son offensive contre la milice kurde syrienne des Unités de protection du peuple (YPG). Loin de se contenter d’assiéger la région d’Afrine, le bastion des YPG, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a envoyé ce matin ses troupes dans les environs d’Alep. La ville n’est pourtant pas connue pour abriter des unités des YPG.
Ainsi qu’il fallait s’y attendre, la manœuvre de l’armée turque a été perçue comme une agression par les Syriens qui ont immédiatement entrepris de la repousser. «Un convoi militaire turc, entré dans la province d’Alep, s’est retiré de la localité d’Al-Ais après des tirs d’artillerie de l’armée syrienne et des forces qui lui sont fidèles», affirme une source syrienne qui indique que «les forces turques ont riposté». La même source soutient que le projet des Turcs est soit de «contrôler la région ou soit de créer une bande de sécurité». Si c’est vraiment le cas, Recep Tayyip Erdogan prend évidemment le risque d’ouvrir un front avec la Syrie et de compliquer davantage la crise car Damas n’acceptera jamais une telle présence sur son territoire. Pour de nombreux observateurs, le Président turc est en train de tenter le diable, surtout qu’il s’est déjà mis à dos de nombreux pays dans la région, à commencer par son allié américain.
Malgré les appels à la retenue, Erdogan a encore réaffirmé, hier, que l’offensive ne s’arrêterait pas «avant l’élimination des Kurdes des YPG qu’Ankara qualifie de “terroristes”». Autrement dit, ce n’est pas demain la veille que son armée va quitter la Syrie. Au contraire, la Turquie a renforcé ses positions dans le Nord-Ouest syrien. Les militaires turcs cherchent actuellement à rejoindre un secteur situé à une quarantaine de kilomètres au sud d’Afrine, ce qui conforte l’idée qu’Ankara veut contrôler davantage de territoires.
Depuis le début de l’opération anti-YPG, le 20 janvier dernier, 85 combattants kurdes ont été tués de même que 81 rebelles pro-Ankara, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH). En outre, 67 civils dont 20 enfants ont péri dans les bombardements turcs, a ajouté l’ONG. L’armée turque a affirmé, quant à elle, avoir perdu 7 soldats dans l’opération. La crise syrienne a déjà fait 340 000 morts.
Evoquée depuis plusieurs mois, l’intervention turque à Afrine a été précipitée par l’annonce par les Etats-Unis de la création d’une «force frontalière» incluant les YPG, et parrainée par la coalition internationale antiterroriste emmenée par Washington. Les combattants kurdes syriens sont présentés comme de précieux alliés de Washington dans la lutte en Syrie contre les éléments de Daech, qui ne contrôlent plus que quelque 5% du territoire après de nombreuses défaites.
L’intrusion de la Turquie en Syrie risquerait à coup sûr aussi de ressusciter Daech.
S. S.
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