Al-Serraj veut-il éjecter la France de Libye ?
Par Sadek Sahraoui – Le responsable du Gouvernement d’union nationale (GNA), Fayez Al-Sarraj, a saisi l’opportunité de sa rencontre cette semaine avec l’ambassadrice de l’Union européenne en Libye, Bettina Mushaidt, pour lancer des messages à Bruxelles. Et le premier de ses messages a été de demander à ce que les pays de l’UE s’entendent une fois pour toutes sur une position commune concernant le dossier libyen.
Al-Sarraj a estimé à ce propos que la forte rivalité entre Paris et Rome entrave la recherche d’un règlement négocié conforme au plan de l’émissaire de l’ONU, Ghassan Salamé qui a critiqué aussi plus d’une fois les interventions étrangères dans le dossier libyen.
Jusque-là silencieuse, la rivalité entre la France et l’Italie est apparue au grand jour après la rencontre de Paris sur la Libye organisée à la fin du mois de mai dernier et qui a fixé la date du 10 décembre pour l’organisation d’élections générales.
Avec le temps, il est apparu que Rome n’était pas d’accord avec cette feuille de route. Le gouvernement italien refuse d’organiser des élections. Il appelle plutôt à l’élaboration d’une constitution et à trouver un compromis pour mettre fin à la division des institutions libyennes.
L’Italie est actuellement forte du soutien des Etats-Unis. Le Premier ministre italien, Giuseppe Conte, s’est rendu, en juillet dernier, à Washington où il a rencontré le président Donald Trump. Conté a réussi à obtenir le soutien de son homologue américain et donc sapé les efforts français d’organiser des élections avant la fin de l’année. Rome veut repousser les élections d’une année.
L’Italie qui soutient le Gouvernement d’union nationale a maintenu son ambassade ouverte à Tripoli au lendemain de la chute de Kadhafi, contrairement à d’autres ambassades occidentales. Rome entretient, en outre, de bonnes relations avec les groupes armés qui contrôlent la capitale et qui protègent le gouvernement libyen lui-même.
Al-Sarraj semble avoir fait siennes les positions italiennes puisqu’il a demandé aussi à ce qu’une constitution soit adoptée avant d’aller aux élections. Autrement dit, il prend clairement ses distances vis-à-vis des résolutions de la Conférence de Paris. A ce propos justement, les observateurs ont considéré ses déclarations comme une tentative de sa part de pousser l’UE à retirer son soutien européen à l’accord de Paris. En d’autres termes, Fayez Al-Sarraj veut éjecter la France de Libye.
S. S.
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