Jérôme Fourquet : «Les enfants de harkis sont de plus en plus radicalisés»
Par Kamel M. – Jérôme Fourquet confirme les propos de Gilles Kepel sur le nombre de plus en plus élevé d’islamistes radicaux parmi les descendants de harkis. «Comme l’a noté Gilles Kepel, il y a un nombre non négligeable d’enfants et de petits-enfants de harkis parmi les musulmans radicalisés, à l’instar de Mehdi Nemmouche, le tueur du musée juif de Bruxelles», a, en effet, affirmé le politologue français. «On observe une sorte de retournement de stigmate : des familles méprisées parce qu’elles étaient dans le camp des perdants et considérées comme des traîtresses à la cause surinvestissent leur identité musulmane. Consciente ou non, cette revanche symbolique peut les amener à entrer dans une course au plus pur», a encore souligné Jérôme Fourquet dans un entretien à Causeur.
Le politologue, tout en rappelant l’attentat commis à Toulouse par Mohamed Merah qui a ciblé des soldats français d’origine maghrébine, estime que cette attaque était sans doute mue par un «rejet de la stigmatisation des harkis». Il relève que les harkis sont une carte entre les mains des différentes obédiences politiques en France, défendus par le Front national, «mauvaise conscience» de la droite, et considérés comme s’étant placés du «mauvais côté de l’histoire» par la gauche.
«La société française a mis des décennies à digérer les années de la guerre d’Algérie», note Jérôme Fourquet, expliquant qu’«il a fallu patienter jusqu’aux années 2000 pour qu’on s’intéresse de nouveau à ce sujet de la guerre d’Algérie qui a coupé le pays en deux et qui est longtemps resté occulté, notamment pour ce qui est de la question des harkis». «Dans la guerre des mémoires, chacun a choisi ses Arabes», ironise-t-il.
Daech privilégierait les recrutements parmi les descendants de harkis, selon le directeur de la DGSI qui semblait «effectivement préoccupé par une hypothétique guerre civile opposant djihadistes et éléments violents d’ultra-droite», rappelle Jérôme Fourquet. Selon lui, «les théoriciens du djihad spéculaient depuis des années sur l’opportunité d’embraser les sociétés européennes». «Pour Daech, affirme-t-il, le but du jeu était de créer la guerre civile, en commettant des attentats marquants susceptibles de dresser les communautés les unes contre les autres.»
K. M.
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