Accord UE-Maroc : Le Parlement européen provoque la panique dans le Makhzen
C’est en octobre prochain que les membres de la commission de la pêche au sein du Parlement européen doivent se réunir pour examiner le projet d’accord de pêche conclu, en juillet dernier, entre le Maroc et la Commission européenne. Les concernés ont prévu au cours de leur réunion d’avoir un «échange de vues avec des représentants du peuple du Sahara occidental». La perspective que des membres du Front Polisario puissent être écoutés par des parlementaires inquiète au plus haut point les autorités marocaines.
Le Makhzen redoute en effet que l’invitation adressée aux Sahraouis constitue le prélude au rejet par le Parlement européen de l’accord de pêche signé en juillet dernier avec l’UE. Cette panique trouve son origine précisément dans le libellé même de la rencontre (échange de vues avec des représentants du «peuple» du Sahara Occidental, ndlr), ce qui constitue déjà une défaite en soit. C’est en effet la preuve que les autorités marocaines et leur protecteur français ont échoué à imposer leur terminologie comme celle consistant à faire remplacer le peuple sahraoui par le vocable de «population locale concernée».
La peur a commencé précisément à s’emparer du Makhzen lorsque la rapporteur de la Commission du commerce international du Parlement européen (INTA), l’eurodéputée française Patricia Lalonde, a récemment relevé la difficulté d’émettre un avis sur l’«application des préférences commerciales UE-Maroc aux produits venant du territoire du Sahara Occidental, principalement des produits agricoles (tomates et melons) et de la pêche». Mme Lalonde avait notamment expliqué la difficulté par l’existence de «différentes opinions» concernant l’opportunité d’un accord commercial à propos des produits du Sahara Occidental, comme mentionné dans les conclusions de son rapport daté du 18 septembre 2018, qui fait suite à sa mission au Sahara Occidental occupé, effectuée à la tête d’une délégation parlementaire, les 3 et 4 du même mois.
Précisant que la mission a été effectuée dans le contexte des «préparations de la recommandation d’approbation du Parlement européen» concernant la proposition d’accord visant à étendre lesdites préférences, l’eurodéputée a fait savoir que des associations et organisations (dans les territoires sahraouis occupés) ont dénoncé le pillage des ressources naturelles», au moment où d’autres intervenants ont affirmé que les Sahraouis ne trouvent pas de travail dans la région et que les autorités locales auraient détruit une partie du patrimoine régional. «Certains intervenants ont aussi indiqué que si l’accord passait au Parlement, le Front Polisario serait dans son droit de reprendre les armes», a, en outre, indiqué l’eurodéputé, avant de préciser qu’une autre association a dénoncé la surexploitation de la pêche en déplorant, dans le même ordre d’idées, que «seulement 5% des agréments de pêche seraient accordés à la population locale».
Il est à rappeler que la CJUE dans ses arrêts du 21 décembre 2016 et du 27 février 2018 avait statué clairement sur l’inapplicabilité des accords commerciaux et de l’accord de pêche UE-Maroc au territoire du Sahara Occidental, du fait de son statut de territoire «distinct» et «séparé» du royaume du Maroc, réaffirmant ainsi la non-souveraineté du Maroc sur le Sahara Occidental, conformément à la légalité internationale et aux résolutions pertinentes des Nations unies.
S. S.
Comment (25)