Témoignage émouvant sur Ben M’hidi : le chahid qui souriait dans la mort
Nous sortons du fond d’un tiroir de l’histoire dépoussiérée un excellent texte paru dans les colonnes du quotidien Alger Républicain le 8 mars 1963, sous la signature de Mohamed Bencharif. L’auteur de l’article nous apprend que les assassins coloniaux du martyr Larbi Ben M’hidi ont, jusqu’à son dernier soupir, tenté de l’inciter à abandonner la noble cause pour laquelle il allait sacrifier sa vie, mais ce dernier «s’enfonça souriant dans la mort».
Par Mohamed Bencharif – «Ben M’hidi… Ben M’hidi…» Son nom courait de bouche en bouche et entrait dans la légende. Pourtant, il n’était mort que depuis six mois.
Dans la cour de la prison d’El-Harrach, on entourait celui qui l’avait vu pour la dernière fois dans la citadelle des tortionnaires. «Il m’a confié sa montre avant de mourir», racontait-il. «Tu l’as donneras à ma mère, m’a-t-il dit, en souvenir et tu embrasseras tous les frères.»
Et dans la cour lugubre, on écoutait dix fois cette même histoire, comme si l’entendre pouvait aider à vaincre la douleur, pouvait ressusciter l’ami. «Un mot seulement, seulement un mot et tu vivras, lui avait-on dit. Que coûte un mot de trahison ? Les mots s’oublient mais tu resteras vivant !» Ce mot, il ne l’a pas dit et il s’enfonça, souriant, dans la mort.
C’était il y a six ans. Sans doute ceux qui allaient le tuer ajoutaient-ils, ironiques : «Tu auras ton nom sur la plaque d’une rue un de ces jours.»
Oui, Ben M’hidi a son nom dans nos rues. Mais ce que les Bigeard ne peuvent deviner, c’est qu’il deviendrait le symbole du courage dans la lutte héroïque, de l’espérance chaleureuse de notre peuple après la victoire. Et, un jour, on apprendra aux enfants de nos écoles à honorer son nom.
Ils diront plus tard : «Pur comme Ben M’hidi, courageux comme Ben M’hidi, dévoué au peuple comme Ben M’hidi, confiant comme Ben M’hidi.»
Ben M’hidi éternellement vivant, souriant encore, par-delà la mort, à l’avenir.
M. B.
Comment (28)