Affaire du meurtre de Jamal Khashoggi : l’Arabie Saoudite se cherche une échappatoire
Par Sadek Sahraoui – L’Arabie Saoudite serait-elle sur le point de changer de ligne de défense dans l’affaire du journaliste Jamal Khashoggi disparu il y a deux semaines après avoir pénétré l’enceinte de son consulat à Istanbul ?
Fort possible ! D’après des sources citées par le New York Times et CNN, ce lundi 15 octobre soir, Riyad se préparerait à défendre une nouvelle version des faits à même de disculper le pouvoir en faisant porter la responsabilité de la disparition à des éléments individuels accusés d’avoir agi de leur propre chef.
Le secrétaire d’Etat des États-Unis, Mike Pompeo, dépêché par Donald Trump, est arrivé ce mardi 16 octobre à Riyad pour faire la lumière sur cette affaire. Il rencontrera aussi l’homme fort du royaume, Mohammed Ben Salmane, prince héritier de la dynastie des Saoud.
La veille, Trump avait lui-même admis que la disparition du journaliste saoudien Jamal Khashoggi «pourrait être le fait d’éléments incontrôlables».
Trump a fait ces déclarations après s’être entretenu dans la journée, par téléphone, avec le roi Salmane d’Arabie Saoudite.
Plus tôt dans la matinée, Trump avait évoqué cet échange dans un tweet : «Je viens de parler au roi d’Arabie Saoudite qui dit tout ignorer de ce qui a pu arriver à “notre citoyen saoudien” (…). J’envoie immédiatement notre secrétaire d’Etat pour rencontrer le roi.»
Les autorités turques ont fouillé dans la nuit de lundi à mardi 16 octobre le consulat saoudien à Istanbul dans le cadre de l’enquête sur la disparition de Jamal Khashoggi. Des responsables turcs affirment que le journaliste a été assassiné par des agents saoudiens dans l’enceinte du consulat, ce que Riyad dément.
Un convoi de six voitures est arrivé dans la représentation diplomatique sous haute sécurité, lundi 15 octobre peu après 19 heures. Les policiers, certains en uniforme et d’autres en civil, sont immédiatement entrés dans le bâtiment. Un groupe de Saoudiens censés participer à la fouille était arrivé sur place environ une heure plus tôt.
A l’issue d’une perquisition sans précédent d’une durée de huit heures, les membres de l’équipe turque ont regagné leurs véhicules et ont quitté les lieux. Ils ont emporté des échantillons, notamment de la terre du jardin du consulat. Cette fouille survient au lendemain d’un entretien téléphonique entre le Président turc, Recep Tayyip Erdogan, et le roi Salmane, au cours duquel ils ont évoqué le cas de Jamal Khashoggi.
L’éditorialiste saoudien, critique du pouvoir de Riyad et qui s’est exilé aux Etats-Unis en 2017, s’était rendu dans la représentation diplomatique le 2 octobre pour des démarches administratives en vue de son prochain mariage avec une Turque, Hatice Cengiz.
Si la nouvelle version que s’apprêterait à livrer Riyad peut augurer d’une sortie de crise après une montée des tensions entre l’Arabie Saoudite et ses partenaires occidentaux, elle risque de se faire au prix du maintien de zones d’ombres autour de la disparition du journaliste saoudien.
De fait, des responsables turcs ont fait émerger au cours des deux dernières semaines des éléments pointant vers la préméditation du meurtre, mettant notamment en évidence certaines précautions prises en amont par «un commando de tueurs» en vue de faire disparaître le corps.
S. S.
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