Ces raisons qui poussent les imams en colère à basculer dans l’intégrisme
Par R. Mahmoudi – A bout de nerfs depuis quelques mois, à cause des agressions dont ils sont la cible, résultat de la montée des courants intégristes dans les mosquées, les imams s’en prennent au ministère de tutelle qu’ils accusent de les avoir livrés à leur sort.
Aujourd’hui, ils ne savent plus à quel saint se vouer. Au rythme où vont les choses, les plus vulnérables d’entre eux peuvent être récupérés par ces mêmes milieux qui cherchent à s’emparer des mosquées et des comités religieux et face auxquels les autorités semblent comme impuissantes.
C’est le constat que l’on peut tirer du regroupement des imams organisés vendredi à Alger. Secoués par le meurtre d’un muezzin mercredi passé à Laghouat, les fonctionnaires des affaires religieuses tirent la sonnette d’alarme et interpellent directement le président de la République pour venir à leur secours. Ils ne croient plus aux promesses du ministre Mohamed Aïssa, qui donnait pourtant l’air de se battre courageusement contre l’intrusion des salafistes dans les lieux de culte gérés par son département, en prenant même une batterie de mesures fortes pour empêcher ces extrémistes de faire main basse sur les comités religieux qu’ils utilisent comme un tremplin pour prendre le contrôle des mosquées.
Face aux risques d’agressions auxquels ils sont confrontés, les imams réunis demandent au chef de l’Etat de leur accorder l’«immunité», à l’instar des magistrats ou des parlementaires. Curieusement, c’est un membre de la commission de fatwa au sein du ministère des Affaires religieuses et des Wakfs, Mohamed-Amine Naceri, qui a formulé, au nom des imams, cette demande adressée au président Bouteflika. Autre preuve que Mohamed Aïssa a perdu toute crédibilité, y compris chez les cadres de son département.
Coïncidant avec la diffusion d’une note officielle interdisant le porte du niqab dans les établissements publics, cette rencontre des imams a été aussi l’occasion pour certains d’entre eux d’exprimer ouvertement leur désapprobation. C’est le cas du président du syndicat des imams, Djelloul Hadjimi, qui demande au gouvernement de «cesser les restrictions contre les libertés individuelles», au motif, selon lui, que «cela risque d’attiser les tensions et semer la discorde dans la société». Prônant ici le discours des islamistes, il demande au gouvernement d’ordonner «l’interdiction des tenues impudiques dans les lieux de travail de la Fonction publique, parce qu’elles contribuent à la dissolution des mœurs».
A lire ces propos, on se rend compte qu’au moins une partie de nos imams a déjà basculé dans l’intégrisme.
R. M.
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