De Villepin : «Le peuple algérien a fait preuve d’une très grande maturité»
Par Karim B. – Dominique de Villepin s’est exprimé sur l’Algérie, considérant que «toutes les crises dont on parle aujourd’hui, l’Algérie, le Venezuela, la France, le Royaume-Uni, ont un point commun». «C’est une crise de confiance entre le peuple et le pouvoir», a souligné l’ancien ministre français des Affaires étrangères sous Jacques Chirac, estimant que «ce qui se joue en Algérie, c’est la capacité à bâtir un chemin qui permette au peuple de faire confiance en ceux qui le dirigent pour préparer une réponse qui soit à la mesure des enjeux, c’est-à-dire un nouveau système, comme on dit en Algérie, qui ne soit pas le système figé qu’ils ont connu».
De Villepin conseille au président français d’éviter toute ingérence dans les affaires intérieures de l’Algérie, faisant sien le leitmotiv de l’Elysée et du Quai d’Orsay, «ni ingérence ni indifférence». «C’est vrai qu’il y a un risque migratoire, qui va des 200 000 binationaux jusqu’à éventuellement beaucoup plus. C’est un risque qui a toujours été présent dans l’esprit des pouvoirs successifs en France depuis des décennies. Ceci dit, et c’est là où nous avons une responsabilité aussi vis-à-vis de nos amis algériens, faisons en sorte, sans ingérence, sans indifférence, d’accompagner l’Algérie pour l’aider justement à trouver la bonne voie qui permettra de trouver une solution».
Réagissant à la décision de Bouteflika de renoncer à briguer un cinquième mandat, l’ancien ministre français a affirmé qu’«il y a quelques éléments qui semblent m’indiquer qu’il y a une écoute». «Le premier élément, c’est un gouvernement élargi d’union nationale. Le deuxième élément, c’est qu’à la tête de la commission qui va être chargée de mettre en place ce processus, il y a une personnalité respectée qui ne joue pas une carte personnelle ou une carte politique», a-t-il expliqué sur la chaîne d’information BFMTV.
«Je crois qu’il va falloir être très vigilant au cours des prochaines semaines», a insisté De Villepin, pour qui les événements en Algérie sont «un processus compliqué parce qu’il s’agit de remettre sur la table une Constitution, le changement d’un système, des années de conservatisme». «Nous sommes, dans le fond, dans le troisième âge des indépendances, après la Guerre de libération, après la décennie terroriste, nous entrons dans l’âge du changement, dans l’âge d’une nouvelle transition», a-t-il dit. «Tout ceci doit être préparé», a ajouté De Villepin. «Il y a d’un côté une attente immense mais, d’un autre côté, une très grande maturité dont a fait preuve le peuple algérien, la jeunesse algérienne, descendant dans la rue de façon pacifique», a-t-il fait observer.
Interrogé sur une éventuelle menace islamiste, Dominique de Villepin a répondu que «la force d’un Etat, c’est d’être capable de se préparer, d’envisager tous les scénarios et d’adopter les mesures qui permettent de prendre en compte les risques». «Il ne faut pas alimenter la peur», a-t-il conseillé, en confiant qu’il se «méfie de ces dirigeants (français, ndlr) qui brandissent la peur en squattant le pire». «Ce n’est pas une attitude responsable», a-t-il conclu.
K. B.
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