Les Frères musulmans se mêlent de la crise algérienne : à quoi joue Ankara ?
Par Houari A. – C’est depuis la Turquie que le prédicateur intégriste Wajdi Ghanim appelle les islamistes algériens à investir la rue et à imposer la Charia en renversant le pouvoir par la force.
Dans une vidéo postée à la veille des grandes manifestations du vendredi dernier, ce prédicateur demande à ses ouailles de ne plus se contenter de porter les revendications exprimées par la majorité des manifestants, à savoir notamment le départ du président Bouteflika ou celui de son système mais de réclamer l’application de la Charia. «Je demande à mes frères algériens, claironne-t-il, d’exiger expressément le départ du régime laïc, incarné par les suppôts de la France coloniale.»
Il demande aux Algériens de ne pas refaire l’erreur commise par les Egyptiens en 2011, lorsque, lors des manifestations contre le régime de Hosni Moubarek, ces derniers appelaient à affronter le pouvoir «main dans la main, avec les chrétiens ou les laïcs». Et de leur conseiller de ne pas se laisser berner par des appels aux réformes ou des changements de leaders qui, selon lui, reproduiront le même système «qui doit être banni par les croyants».
Sur un ton agressif, cet agitateur membre de la secte des Frères musulmans, qui travaille aujourd’hui pour le compte du régime d’Erdogan, demande aux islamistes algériens de se méfier de toute cohabitation avec certains leaders laïcs de la contestation, dont des femmes non voilées, allusion claire à Zoubida Assoul. «Ne les laissez pas récupérer le mouvement ! Ne faites pas comme nous en Egypte !» avertit-il. Sur sa lancée, il prévient les Algériens contre «les manipulations des militaires», en leur demandant de retenir la leçon de ce qui s’est passé dans son pays et de ne pas se fier aux «messages de fraternité» qui leur sont adressés et qui sont, selon lui, «un piège».
Pour mieux faire passer ses messages, ce prédicateur reprend un discours très en vogue dans les milieux populaires en Algérie, comme celui de la corruption et du pillage des richesses d’un pays qui regorgent de ressources naturelles qui ont atteint un niveau tel que l’Algérie n’est pas dotée d’un seul hôpital digne de ce nom pour soigner son président malade.
Il faut signaler que ce prédicateur de la fitna n’a eu que des insultes des youtubeurs algériens en réponse à son appel. Les commentaires indignés étaient tellement dominants qu’il a été obligé de les effacer sur la chaîne, après s’être rendu compte que son prêche a, au contraire, réveillé le ressentiment des Algériens contre les semeurs de la discorde et les apôtres du terrorisme.
H. A.
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