Un journal arabe : «L’Algérie s’achemine vers un scénario à l’égyptienne ?»
Par R. Mahmoudi – C’est l’interrogation que soulève un éditorial du quotidien arabe Al-Quds Al-Arabi dans sa dernière édition. Ce journal, récemment racheté par des Qataris, mais qui tente tant bien que mal de garder une certaine neutralité dans ses comptes rendus, rend d’abord hommage à la mobilisation, «sans égal dans le monde arabe», du peuple algérien pour imposer le changement démocratique dans son pays.
Pour l’éditorialiste, l’implication des corps d’Etat dans les manifestations – policiers, magistrats… – atteste déjà du succès de cette révolution citoyenne. «La participation massive de la population au mouvement, qui lui a permis d’arracher des acquis importants en peu de temps, écrit l’éditorialiste, a fini par transformer sa vocation. Les manifestants ont gagné en audace, en exigeant désormais un changement de la nature du système. (…) Ce qui a poussé les autorités algériennes à faire de nouvelles concessions, en conservant leur contrôle sur la ‘’transition’’ pour choisir un successeur à Bouteflika au sein des appareils du pouvoir lui-même, composé du gouvernement, du Conseil constitutionnel et du Parlement.»
Selon cette analyse, le mouvement populaire doit poursuivre ses pressions sur l’institution militaire, décrite comme «la force régulatrice du pouvoir», pour l’amener à faire pression, à son tour, sur le chef de l’Etat pour se retirer à la fin de son mandat actuel et assurer, en même temps, une représentation du «hirak» et des partis de l’opposition dans l’organisation de la transition devant aboutir à des élections réellement démocratiques et la mise en place d’un «gouvernement de salut national».
«A défaut de quoi, conclut l’éditorial d’Al-Quds Al-Arabi, ce serait la voie ouverte à un retour de l’armée aux commandes. Auquel cas, il faudrait s’attendre à ce que le futur pouvoir remette en cause les acquis démocratiques obtenus par les Algériens, et déroulerait le tapis à un »Sissi » algérien qui risque de faire replonger le pays dans une spirale de violence que les Algériens s’efforcent depuis des années à surmonter.»
L’auteur use ici de deux clichés usités par la presse internationale. D’abord, en faisant machinalement le parallèle avec l’expérience égyptienne. Or, l’avènement du général Abdelfattah Al-Sissi au pouvoir a été dicté, comme on le sait, par le danger islamiste que représentaient les Frères musulmans, au bout de deux ans de règne. L’armée égyptienne s’était bien accommodée, au départ, avec la transition qui a été vite confisquée par les islamistes.
Aussi, l’intervention de l’armée algérienne en 1992, à laquelle le journal arabe fait allusion, fut la réponse à la déferlante d’un parti extrémiste, le FIS, qui menaçait l’Etat et la nation dans leurs fondements mêmes.
R. M.
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