Jnan tab(*), récoltons les fruits !
Par Kouider K. – Devenue mature, la révolution pacifique prend de la hauteur. Drainant des millions de citoyens, elle grandit au fil des semaines et glane chaque vendredi les fruits mûrs de son jardin, l’Algérie.
Du non au 5e mandat à celui de la prolongation du quatrième, elle les a toutes récoltés par le sourire. Aujourd’hui, elle se trouve à la croisée des chemins. Déraciner les mauvaises herbes des 3B et débroussailler celles qui avaient jusqu’ici tari la richesse du sol de son potager ou, au contraire, laisser repousser les mauvaises graines. En d’autres termes, obtenir la démission de 2B qui restent – le départ du gouvernement et la démission du président du Sénat –, laisser à la justice le soin d’instruire les dossiers de la corruption ou, au lieu de tout cela, accepter l’application stricte de la Constitution.
Epaulée par l’armée, qui, dès le second vendredi, avait pris fait et cause pour le peuple, la révolution du sourire a fini par faire abdiquer un Président rivé à son trône. Aujourd’hui, bien que l’armée ait appelé à l’application des articles 102, 7 et 8 de la Constitution pour dénouer la crise politique que traverse le pays, des voix s’élèvent pour exiger le respect de la Constitution, et donc permettre aux hommes du Président démissionnaire de régénérer le même pouvoir à l’origine de la crise.
Parallèlement à toutes ces voix, la manifestation du septième vendredi a été émaillée par de petits incidents causés par des trouble-fête : un groupuscule d’énergumènes agressait des manifestants pendant que d’autres chahutaient quelques figures de proue du mouvement populaire. Aujourd’hui, il va de soi que des forces occultes veulent saborder la révolution du sourire et nuire à son pacifisme. Ces forces placent leurs intérêts au-dessus de la stabilité de l’Algérie et de la volonté de son peuple. Ils crient au vide constitutionnel qu’engendrerait le départ des 3B et de tout ce qu’ils représentent.
Comment sortir alors de cette ornière ?
La Constitution a été maintes fois triturée et piétinée par le pouvoir. Il ne faut donc pas que les tenants de ce même pouvoir crient au scandale si les gens de bonne volonté s’accordent à trouver une solution à la crise. La plus plausible des solutions réside dans l’ajout de deux alinéas à l’article 102 : la désignation d’un présidium à la tête de l’Etat et d’un CNT (Conseil national de transition) pour légiférer pendant la période de transition, ainsi que la mise sur pied d’une commission indépendante de surveillance et de suivi des processus électoraux. Pour ce faire, le président du Sénat et celui du Conseil constitutionnel déposent au préalable leur démission. Ensuite, le gouvernement actuel présente le projet de révision au vote des deux assemblées, et le tour est joué.
Une large concertation s’ensuit entre l’armée, les partis politiques et les figures du mouvement populaire pour choisir une personnalité nationale probe et propre à la tête du présidium. Le présidium ainsi choisi commencera par dissoudre le gouvernement et les deux chambres. Il désignera, en accord avec la classe politique, un nouveau gouvernement ainsi que les membres du CNT. Commence alors un long travail de six à neuf mois entre les trois institutions pour asseoir définitivement les règles de fonctionnement de la commission indépendante de suivi, de surveillance et de déclaration des résultats des élections. La désignation du président et des membres de cette commission devra obtenir aussi le consensus de toute la classe politique. C’est à la fin de cette période que l’élection du premier Président de la seconde République aura lieu, et il sera ensuite suivi par les élections des assemblées communales et de l’APN.
K. K.
(*) Proverbe algérien utilisé par Bouteflika pour annoncer son départ en 2012.
Ndlr : Les opinions exprimées dans cette tribune ouverte aux lecteurs visent à susciter un débat. Elles n’engagent que l’auteur et ne correspondent pas nécessairement à la ligne éditoriale d’Algeriepatriotique.
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