Une Italienne issue de la noblesse parle de sa passion pour l’Algérie
Née à Rome et issue d’une illustre lignée de la haute noblesse apparentée aux grandes familles d’Europe, Caterina Manca di Villahermosa est chercheuse en histoire de l’art et fait office de référence dans son pays en matière d’optimisation du tourisme archéologique, notamment à travers les moyens technologiques modernes.
En 2011, le tournant dans sa vie est la décision de rejoindre la structure du groupe Kanaga Adventure Tours et de s’installer à Bamako pour réaliser son rêve de toujours, à savoir promouvoir un tourisme de type culturel centré sur le Sahara et l’Afrique.
De passage dans la ville éternelle, elle a accepté de nous en dire un peu plus sur le succès enregistré par la destination Algérie auprès du public italien et nous avons pu l’interroger sur ses projets et sur les atouts de notre tourisme et d’autres questions liées à ce secteur. Interview.
Algeriepatriotique : Comment décriveriez-vous l’Algérie, un pays que vous avez visité plusieurs fois ?
Caterina Manca di Villahermosa : J’ai été la première fois en Algérie à l’invitation de l’Onat, en 2013, au Salon du tourisme d’Alger et, en qualité d’experte, j’ai été conviée à participer à un tour de promotion et de découverte de la destination.
Dès 2013, j’ai pu constater que des efforts importants étaient consentis pour essayer de relancer ce secteur dans votre pays et notre structure Kanaga Adventure Tours (opérateur touristique italien en Afrique, ndlr) a commencé à prendre en compte cette destination qui, à mon avis, a un grand potentiel commercial. Cela dit, nous avons attendu que les conditions soient réunies pour l’intégrer dans notre calendrier et cela s’est concrétisé en 2017.
En ce qui me concerne et pour le compte du groupe, j’ai accompagné des groupes en novembre 2018 et l’impact parmi les touristes a été immédiatement des plus positifs. On aurait dit que nos clients italiens n’attendaient que ça : visiter votre beau pays. D’ailleurs, entre la partie archéologique visitée en 2013 et les régions du Hoggar et du désert du Tadrart Rouge, je n’aurais pas de mot pour vous décrire les merveilles de l’Algérie. Car on ne peut décrire en quelques lignes un patrimoine archéologique d’époque romaine qui, en importance, vient juste après celui d’Italie, les paysages et les panoramas de la plus belle partie de ce fleuve immense qu’est le Sahara. Mille images et mille mots ne suffiraient pas.
Un matériel immuable qui enchanterait tout voyageur désireux de découvrir les magies de ce pays, parce que l’Algérie, il faut la vivre et la voir pour pouvoir la décrire et, vraiment, je ne me sens pas à la hauteur d’une description exhaustive. Seul un grand poète et un érudit pourrait se valoir d’un tel privilège.
Quelles demandes recevez-vous des groupes que vous accompagnez ?
Nous avons un profil de personnes et de voyageurs, experts et passionnés, qui nous demandent des circuits de découverte de la nature et de l’anthropologie. Plus particulièrement, le tour dans le désert algérien est de loin le plus recherché mais nous avons également d’excellents résultats avec le tour archéologique, des villes comme Cherchell, Timgad, Tipasa et Djemila sont des merveilles. Probablement le désert qui était auparavant déclaré off limits suscite toujours chez les Italiens un engouement et un émerveillement infinis.
L’Algérie pourra-t-elle devenir une destination touristique de niveau international ?
Absolument. Oui. Et c’est dommage qu’une telle richesse ne soit pas mise en valeur, bien qu’étant à quelques kilomètres de distance du marché européen. La contribution que nous pouvons offrir, à notre niveau, c’est de faire la promotion de cette destination auprès du marché italien mais cela ne doit pas être un effort isolé. Nous devons agir de concert avec nos partenaires algériens.
Votre dernière visite a coïncidé avec le début des manifestations populaires. Comment s’est déroulé votre séjour ?
Sincèrement, nous ne nous sommes même pas rendu compte de ce qui se passait mais, en traversant Alger, Djanet et Tamanrasset, l’ambiance était bon enfant et nous n’avons remarqué aucune agressivité, encore moins une animosité de la part des Algériens. J’ai cru comprendre que vos concitoyens étaient particulièrement fiers du caractère pacifique et jovial des marches et nombre de personnes m’ont fait le parallèle avec les marches des Gilets jaunes en France et les violences enregistrées là-bas.
Un projet ou une idée que vous comptez lancer pour motiver les Italiens à visiter notre pays ?
Nous avons d’ores et déjà lancé un programme assez ambitieux et je peux vous dire que les résultats sont excellents. On dirait même que les voyageurs italiens n’attendaient que ça. Ils guettaient le feu vert pour se lancer en direction de vos belles villes. Mais pour être franche avec vous, nous devrions également motiver les autorités algériennes à nous faciliter la tâche. Par exemple, pour obtenir un visa touristique, on doit faire avec des conditions assez contraignantes. Prenons, par exemple, le cas de la Mauritanie, autre pays frontalier, considéré très dangereux jusqu’à une période récente et qui est en train de s’ouvrir au tourisme.
Si je puis me permettre, vos autorités devraient simplifier la procédure en délivrant ces visas au niveau de l’aéroport, comme le font de nombreux pays. Vous savez, le tourisme exige une certaine flexibilité et c’est ainsi qu’on motive les voyageurs à choisir une destination plutôt qu’une autre. Or, en ce moment, nous fixons nos programmes au moins trois mois avant et nous demandons à nos clients d’accepter nos offres sans détails, sans leur fournir des dates et des horaires précis. Et vous savez que pour obtenir le visa, on nous demande, entre autres, les plans de vol. Enfin, l’escorte obligatoire à Constantine ou à Ghardaïa n’est pas de nature à offrir un cadre serein à ces voyages, d’autant que nos clients, pour rien au monde, ne voudraient perdre le lever du soleil sur l’Assekrem. Certes, je comprends que les dispositions de sécurité sont plus que justifiées mais, à l’avenir, un peu plus de flexibilité nous facilitera la tâche, rendra nos séjours plus agréables et la destination Algérie plus fun, si je puis m’exprimer ainsi.
Propos recueillis à Rome par Mourad Rouighi
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