Un livre compare Bouteflika à Napoléon Bonaparte : confessions et inexactitudes
Par R. Mahmoudi – Dans un ouvrage à paraître bientôt, consacré à l’incomparable parcours d’Abdelaziz Bouteflika, le journaliste et traducteur Abdelaziz Boubakir tente de lui trouver des similitudes avec Napoléon Bonaparte pour expliquer les raisons de son maintien au pouvoir durant vingt ans.
Intitulé Bouteflika, l’homme du destin, l’ouvrage est une synthèse d’articles qui reviennent sur la vision de l’Etat et du pouvoir de celui qui a été déchu dans les conditions que tout le monde connaît, le 2 avril dernier. L’auteur trouve chez l’ex-chef d’Etat beaucoup de Bonaparte, le plus célèbre empereur de France, qui a dit un jour : «Je suis l’homme du destin !» Comme donc Bonaparte, Bouteflika se voyait l’homme prédestiné à gouverner l’Algérie et, comme lui aussi, «il finira humilié, banni et se rendra compte, tardivement, à quel point il s’était trompé d’époque, d’histoire et de lui-même», dira l’auteur.
Dans une interview à Al-Jazeera, Abdelaziz Boubakir évoque les rapports «tumultueux» de l’ex-président de la République avec l’institution militaire, en expliquant que Bouteflika a exploité la confiance que l’armée avait placée en lui pour se retourner contre elle. «Il a toujours menacé les chefs de l’armée de dévoiler leur corruption et de les envoyer au Tribunal pénal international. C’est ainsi qu’il a réussi à se débarrasser d’eux, les uns après les autres (…) C’était cela son plan : se retourner contre ses bienfaiteurs qui l’avaient placé», soutient Boubakir qui s’est, toutefois, totalement emmêlé les pinceaux ici en disant que «le début, ce fut en se retournant contre le général Khaled Nezzar, l’ex-ministre de la Défense, et arrivant au général Mohamed Mediene dit Toufik, l’ex-chef des services de renseignements, qui avaient joué un rôle important dans son intronisation, en lui remettant les clés de la Présidence sur un plateau d’argent».
Pour un spécialiste de l’histoire politique, pareille bourde est inadmissible. Le général Nezzar avait déjà pris sa retraite (1994) cinq ans avant l’avènement d’Abdelaziz Bouteflika à la tête de l’Etat. D’ailleurs, l’ex-ministre de la Défense va revenir sur cet épisode et celui du règne de Bouteflika dans un livre prémonitoire, censuré à sa parution en 2003, soit avant même la fin du premier mandat, et qu’il va republier très prochainement. Il y rappelle comment l’«égo démesuré» et les «dérapages verbaux» de l’ex-chef d’Etat ont rameuté une certaine presse contre l’institution militaire et conduit des magistrats étrangers à ouvrir des procédures et émettre des commissions rogatoires contre d’anciens responsables militaires.
Pour le reste, le portrait que brosse Boubakir d’Abdelaziz Bouteflika ne nous éloigne pas des descriptions contenues dans l’ouvrage du général Nezzar : «Machiavélique», un «malade de pouvoir», «condescendant», «imbu de sa personne», etc.
Enfin, Abdelaziz Boubakir révèle que le tome II des mémoires de Chadli Bendjedi, dont il est le rédacteur et qui n’est jamais paru, a été censuré à cause d’un chapitre consacré aux relations de Bouteflika avec les présidents Bendjedid et Boumediene.
R. M.
Comment (78)