Il revient au galop
Par Karim B. – Pendant que l’économie du pays coule à vue d’œil et que la crise politique s’enlise dangereusement, le chef de l’Etat intérimaire et le Premier ministre persévèrent dans les pratiques machiavéliques dont ils ont acquis les préceptes à l’école de Bouteflika.
De leur côté, les supports gouvernementaux – presse, télé et radio – reprennent les mêmes réflexes après que les journalistes s’étaient soulevés contre la chape de plomb qui a toujours pesé sur les médias lourds, jusqu’à en faire des outils de propagande au seul bénéfice des pouvoirs successifs. Ce sursaut de dignité a vite été enterré pour revoir le naturel revenir au galop.
Pour donner l’illusion d’une normalité toute factice, Noureddine Bedoui est reçu, de façon cyclique, en audience par Abdelkader Bensalah qui lui prodigue des conseils quant aux priorités à mettre en œuvre pour «veiller au bien-être du citoyen». Des images qui rappellent étrangement celles d’Abdelaziz Bouteflika recevant Ahmed Ouyahia et, avant lui, Abdelmalek Sellal, tous deux en prison, pour «s’enquérir» de la situation de son peuple ; en réalité, pour faire le bilan de l’achat de la paix sociale pour laquelle le régime a dépensé des milliards de dollars pour, au bout du compte, déboucher sur une révolte massive.
Aujourd’hui, alors que des millions de citoyens ont décidé de ne plus laisser la chose politique entre les mains d’une poignée de charlatans politiques et une oligarchie qui a pillé le pays, les rescapés du système s’agrippent à une Constitution caduque, amputés du semblant de légitimité que Bouteflika s’était construit à travers des institutions croupion, d’ailleurs toujours existantes.
Le dessein du pouvoir n’est pas de sauver le pays mais de sauvegarder le système sans lequel il sera voué aux gémonies. Ses détenteurs actuels sont pleinement conscients que la fin réelle du régime Bouteflika signifie la leur et que, tout comme les responsables politiques et les hommes d’affaires qui paient aujourd’hui en tant que pièces «jetables» dans l’engrenage qui broie les Algériens depuis 1999, ils subiront le même lynchage qu’ils ont orchestré pour tromper une opinion plus que jamais éveillée et résolue à arracher le système avec ses racines pour que jamais il ne repousse.
K. B.
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