Arrestation du candidat Nabil Karoui en Tunisie : le syndrome algérien
Par Saïd N. – L’arrestation spectaculaire de l’homme d’affaires et candidat à l’élection présidentielle en Tunisie Nabil Karoui vient dévoiler l’extrême fragilité de l’unique modèle démocratique dans la région du Maghreb et démonter, ainsi, l’image tant vantée par les médias européens d’une Tunisie affranchie des apesanteurs de l’ancien système, hérité de l’ex-président Zine El-Abidine Ben Ali.
Plutôt que de poursuivre le processus de démocratisation, entamé il y a huit ans, les Tunisiens semblent tentés par une régression à l’algérienne. En inculpant, puis incarcérant un opérateur économique de premier plan qui a tant contribué à la modernisation et à la libéralisation, notamment, du champ médiatique tunisien, avec la chaîne de télévision qu’il a créée, Nessma TV, et qui, par son punch et son activisme politique, a réussi à faire concurrence à la fois aux apparatchiks de l’ancien régime, recyclés en partie dans le parti aujourd’hui au pouvoir, Nidaa Tounes, et aux islamistes du mouvement Ennahdha qui mènent leur offensive pour revenir aux commandes du pays.
Après ce coup de force sans précédent contre la démocratie en Tunisie, les observateurs internationaux sont nombreux à redouter une chasse aux sorcières qui, comme en Algérie, sacrifiera des adversaires politiques sur l’autel de la lutte anticorruption et restaurera, pour ce faire, une justice aux ordres et ramènera le pays en arrière. Car, au-delà des griefs qui sont retenus contre l’homme d’affaires Nabil Karoui, le but recherché par l’arrestation et l’incarcération de cet homme d’affaires en pleine campagne électorale est de frapper les esprits et, en même temps, de mettre en garde ses partisans, regroupés dans le parti Qalb Tounes, contre toute tentative de soulèvement, en instaurant un climat de terreur.
Exactement comme en Algérie où les décideurs, sous prétexte de la lutte contre la corruption et la dilapidation des deniers publics, ont peu à peu installé un régime dictatorial.
S. N.
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