Gaïd-Salah officialise l’implication de l’armée dans la crise politique actuelle
Par Abdelkader S. – En prononçant son discours face au chef de l’Etat intérimaire et aux membres du gouvernement, le chef d’état-major de l’armée implique désormais l’ANP politiquement et de façon directe dans la grave crise institutionnelle que traverse le pays.
Ahmed Gaïd-Salah a repris mot pour mot ses harangues jusque-là adressées à l’institution militaire à partir d’une caserne. Le ton est le même : violent, menaçant, belliqueux, usant de termes inappropriés et reprenant la sempiternelle rengaine qui voudrait que le peuple soit en «parfaite symbiose avec le régime» (sic).
Le discours lu par le chef de l’armée à partir du siège de la présidence de la République n’est pas de nature à apaiser les esprits. Prononcé la veille des manifestations de ce mardi, jour férié, qui s’annoncent encore une fois massives, le «réquisitoire» de Gaïd-Salah confirme l’acharnement du système à se maintenir en dépit du rejet exprimé par l’écrasante majorité du peuple.
Par ailleurs, la Conseil des ministres «présidé» par Abdelkader Bensalah dément les rumeurs sur un supposé désaccord entre le président intérimaire, dont la mission s’est normalement achevée le 9 juillet dernier, et «son» vice-ministre de la Défense nationale dont de nombreuses sources s’accordent à dire qu’il sera «de toute évidence» maintenu au sein de la nouvelle équipe qui remplacera les membres du gouvernement actuel sous la probable conduite du revenant Abdelmadjid Tebboune, lui-même ancien ministre de Bouteflika.
Acculé par l’ampleur des manifestations et cerné par les revendications des citoyens qui réclament son départ immédiat et sans condition, le chef de l’armée cherche à «légitimer» sa persistante longévité à la tête de l’institution en enfilant à nouveau son costume civil et en s’exprimant à partir d’El-Mouradia, couverture civile au régime militaire qu’il veut imposer aux Algériens.
L’intervention de Gaïd-Salah au Conseil des ministres démontre, en tout cas, que le pouvoir persévère dans son refus de se plier à la revendication principale des millions de manifestants qui battent le pavé depuis le 22 février dernier et qui se disent déterminés à poursuivre leur mouvement jusqu’à l’éviction des symboles du système Bouteflika. S’appuyant sur le même argument, celui du respect d’une Constitution dont le peuple ne reconnaît que les articles 7 et 8, le régime s’enfonce dans ses contradictions et empêche toute solution à la crise qui va en s’aggravant.
A. S.
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