Le troublant soutien d’un journal officiel à Benflis qui fausse tous les calculs
Par Nabil D. – Pour la version arabophone du quotidien gouvernemental El-Moudjahid, le futur président de la République sera sans conteste Ali Benflis. Pour convaincre de cette «évidence», ce média de propagande pro-régime s’est adonné à un calcul des soutiens aux cinq candidats sur les réseaux sociaux. Ainsi, on apprend que l’ancien directeur de campagne de Bouteflika en 1999 prendrait le large devant ses concurrents qu’il lamine littéralement.
Si l’on se fie au calcul d’El-Moudjahid, dans sa version arabe, qui parle d’un «sondage» effectué sur Facebook, Ali Benflis glanerait plus de 1 375 000 voix, loin devant ses poursuivants directs, qui ne sont ni Tebboune ni Mihoubi. En effet, le président de Talaie El-Houriyet serait suivi par Abdelaziz Belaïd avec un peu plus de 70 000 soutiens et Abdelkader Bengrina qui avoisinerait les 60 000 voix. L’ancien ministre de l’Habitat ne récolterait, lui, que 32 000 votes en sa faveur, tandis qu’Azzedine Mihoubi occupe la dernière place du classement avec à peine 18 000 voix.
Par-delà ces chiffres aléatoires, c’est le zèle dont fait montre ce média officiel qui suscite des interrogations. Outre une couverture quasi exclusive dédiée au candidat Ali Benflis, El-Moudjahid exhibe la photo d’un manifestant portant une pancarte hostile à Abdelmadjid Tebboune et sur laquelle on lit : «Tebboune s’acoquine avec un baron de la bière et son fils avec un baron de la cocaïne».
La version hebdomadaire d’El-Moudjahid, à l’instar de tous les médias gouvernementaux, sont peu lus et ont une visibilité réduite, pour ne pas dire quasi inexistante. Mais ce genre d’«attitude» de la part de ces relais du pouvoir permet de déceler des signes sur les manœuvres secrètes des décideurs du moment qui désarçonnent l’opinion publique et les observateurs les plus avertis. Le lâchage de l’homme-lige de Gaïd-Salah, jeté en pâture depuis trois jours par les médias soumis à l’état-major de l’armée dans ce qui semble être clairement une opération commanditée en haut lieu, a complètement déstabilisé le candidat jusque-là favori qui perd ainsi son principal soutien – l’appareil de l’Etat constitué par l’administration, la justice et les médias – sans lequel sa candidature n’a même plus lieu d’être.
On aurait pu penser que l’état-major de l’armée aurait jeté son dévolu sur Azeddine Mihoubi, mais le classement d’El-Moudjahid fausse tous les calculs et remet en cause toutes les conjectures et toutes les analyses qui semblaient plausibles, avant ces derniers soubresauts.
N. D.
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