Comment le général Gaïd-Salah a tué la confiance entre le citoyen et son armée
Par Abdelkader S. – La réaction des internautes à l’information rapportée hier, selon laquelle un attentat contre le Hirak aurait été déjoué grâce à la vigilance des services de sécurité, révèle à quel point les citoyens ne font plus confiance en leurs institutions. Cette perte de cohésion entre gouvernants et gouvernés s’est aggravée durant ces derniers mois caractérisés par le passage en force de l’ancien chef d’état-major de l’armée, qui a imposé sa feuille de route par l’intimation, la menace, la provocation, les tentatives de division et la répression.
Cette double rupture de confiance – envers le pouvoir dans son ensemble et les médias qui lui sont inféodés – a fait dire aux citoyens sceptiques que le Hirak ne sera pas ébranlé par ces annonces qui, selon eux, ont pour seul but de décourager le Mouvement de contestation populaire. «La ceinture explosive se trouve à El-Mouradia», a commenté un internaute, tandis qu’un autre a martelé : «Nous vous répétons que nous irons jusqu’au bout», traduire «vos mises en garde ne nous feront pas abandonner notre révolte pacifique».
Des médias ont relayé ce jeudi, soit la veille de la cinquantième semaine de manifestations, un communiqué du ministère de la Défense nationale faisant état du démantèlement d’une cellule terroriste à Birtouta, au sud-ouest d’Alger, et la neutralisation d’un individu qui planifiait de se faire exploser au milieu des manifestants lors des marches de ce vendredi.
La posture belliciste adoptée par Gaïd-Salah qui, durant de longs mois, a multiplié les discours provocateurs, a fini par faire perdre toute crédibilité aux services de sécurité et au ministère de la Défense nationale dont il avait monopolisé les prérogatives, en étendant son pouvoir autocratique tentaculaire à toutes les autres institutions de l’Etat dont, notamment, les médias et la justice. De nombreuses sources ont sérieusement remis en cause les fameuses saisies d’armes près des frontières sud du pays. Ces sources croient savoir que ces opérations étaient montées depuis de longues années par Gaïd-Salah pour montrer à l’ancien Président qu’il effectuait un travail «remarquable» qui devait faire que Bouteflika continuât à lui accorder sa confiance pleine et entière.
Ces mises en scène qui consistaient à mettre en valeur la découverte récurrente de caches d’armes et de casemate vides avaient fini par discréditer l’institution militaire dirigée alors par un chef d’état-major aux compétences limitées mais qui «convenait parfaitement» à Abdelaziz Bouteflika dans ses calculs politiciens qui ont fini par lui coûter son poste et par conduire tout son aréopage en prison, dont son propre frère.
Le nouveau chef d’état-major devra prendre sur lui d’effacer le passage catastrophique de son prédécesseur à la tête de l’ANP. Il a commencé par corriger une première aberration, en se déchargeant de la fonction politique de vice-ministre de la Défense. Il lui reste à remédier aux graves dérives de Gaïd-Salah.
A. S.
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