Troublante révélation d’Abdelmadjid Attar sur une «injonction par téléphone»
Par Kamel M. – Révélée sous forme de boutade, l’information est passée inaperçue. Pourtant elle est signifiante. «A peine ai-je été désigné que j’ai commencé à recevoir des coups de téléphone me demandant de limoger Untel et de nommer tel autre», a, en effet, affirmé le revenant Abdelmadjid Attar dans sa toute première rencontre avec la presse. «Je les ai envoyés balader», en partant d’un éclat de rire. C’est, d’ailleurs, sur un ton «léger» que le nouveau ministre a répondu aux questions des journalistes.
Si Abdelmadjid Attar a jugé utile de raconter cette «anecdote» et a répondu avec autant de désinvolture, c’est que l’appel téléphonique en question ne peut avoir émané du président de la République ou du Premier ministre. De qui Abdelmadjid Attar, rompu aux coups de Jarnac de par sa longue expérience dans les rouages de l’administration et les dédales de la politique, parlait-il ? Qui s’est cru suffisamment puissant pour «demander» au membre du gouvernement de remanier le département de l’Energie selon sa convenance ? A cette question, le remplaçant de Mohamed Arkab, désormais chargé des mines, ne répondra sans doute jamais.
Le phénomène de l’injonction par téléphone s’est notamment répandu de façon alarmante dans le secteur de la justice ces derniers mois. Au lendemain de la déchéance d’Abdelaziz Bouteflika, les tribunaux ont été transformés en arme de dissuasion entre les mains de l’ancien chef d’état-major de l’armée et de l’ex-patron de la sécurité intérieure qui dressait des listes de gens à emprisonner au gré des humeurs et des lubies de son chef et des comptes que lui-même et les autres membres de son clan devaient régler avec des officiers, des ministres, des walis, des hommes politiques, des journalistes et des militants «gênants».
La révélation d’Abdelmadjid Attar signifie-t-elle que cette pratique est non seulement toujours en vigueur, mais qu’elle a gagné d’autres secteurs stratégiques ? La réponse cinglante du nouveau ministre à ses interlocuteurs indique, cependant, qu’il a le feu vert du président Tebboune et qu’il n’a de comptes à rendre qu’à sa hiérarchie.
Abdelmadjid Attar est connu pour être un responsable qui ne se laisse pas marcher sur les pieds et qui, donc, a pu effectivement rabrouer ceux qui l’invitaient à agir selon leur bon vouloir. Mais tous les responsables n’ont pas cette audace, ce qui signifie que le téléphone continue quand même de sonner. Jusqu’à quand ?
K. M.
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