Hostilités entre le Maroc et le Polisario : le pied de nez de Ben Zayed à l’Algérie
Par Abdelkader S. – Le premier pays à avoir apporté son soutien au Makhzen est les Emirats arabes unis. En effet, à peine les hostilités entre armées marocaine et sahraouie ont-elles commencé qu’Abou Dhabi s’est empressé de prendre fait et cause pour «le Maroc frère». Pied de nez à l’Algérie considérée par Rabat comme une partie intégrante du conflit qui oppose les deux pays.
«L’Etat des Emirats exprime sa solidarité avec le royaume du Maroc frère et soutient la décision de sa majesté le roi Mohammed VI de mettre un terme à l’infiltration illégale dans la zone-tampon de Guergarate qui relie le Maroc à la Mauritanie dans le but d’assurer le cheminement ordinaire des marchandises entre les deux pays voisins», indique un communiqué du régime d’Abu Dhabi relayé par l’agence officielle émiratie.
«Le ministère des Affaires étrangères et de la Coopération internationale dénonce les provocations et les pratiques vaines et inacceptables qui ont lieu depuis le 21 octobre dernier et qui constituent une violation flagrante des accords en vigueur et une menace sérieuse pour la stabilité et la sécurité dans la région», ajoute le communiqué qui précise que les Emirats «renouvellent leur soutien effectif au royaume du Maroc dans toutes les décisions qu’il jugera nécessaires pour défendre l’intégrité et la sécurité de ses territoires et de ses citoyens».
Dans un autre communiqué plus mesuré, Abu Dhabi «salue les efforts du secrétaire général des Nations unies visant à trouver une solution politique au conflit qui dure depuis des décennies», tout en «renouvelant sa position immuable relative au règlement des contentieux par le dialogue, la diplomatie et les voies pacifiques» et en appelant à «faire preuve de vigilance et de sang-froid».
Il n’y a rien d’étonnant dans l’attitude fiévreuse de Mohamed Ben Zayed qui vole ainsi au secours de son allié Mohammed VI, à la veille d’une nouvelle étape du plan de normalisation avec l’entité sioniste que l’homme fort d’Abou Dhabi doit mener à son terme sous l’égide de Washington. Les Emirats arabes unis ont tout à gagner dans leur rapprochement avec Israël qui a intercédé auprès des Américains pour fournir à cette pétromonarchie du Golfe en avions de guerre de dernière génération jusque-là réservés aux seules armées américaine et israélienne. Les Al-Nahyane, comme les Al-Saoud, ont besoin de la couverture de Tel-Aviv dans la guerre froide qui les oppose à l’Iran et risque d’éclater à n’importe quel moment.
Les Emirats ont promis à Mohammed VI de convaincre les Etats-Unis d’ouvrir un consulat à Dakhla et de lui donner un coup de pouce dans le dossier sahraoui en contrepartie d’un ralliement du Maroc au plan de reconfiguration du Moyen-Orient et du Maghreb échafaudé dans les bureaux capitonnés de la CIA depuis de longues années et dont le coup de starter a été donné par Donald Trump. Le changement de locataire à la Maison-Blanche risquant de fausser les calculs, les acteurs du plan Jared tentent d’accélérer le rythme avant que le projet vole en éclats. Et la guerre qui pointe à l’horizon au Sahara Occidental tombe comme un cheveu dans la soupe et compromet les velléités émiraties dans la région.
Le fossé se creuse entre l’Algérie et les Emirats arabes unis et les mois à venir pourraient apporter leur lot de surprises dont, notamment, un probable «divorce» entre les deux pays, à l’opposé l’un de l’autre sur tous les dossiers internationaux, de la question sahraouie à la cause palestinienne, en passant par le conflit libyen.
A. S.
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