Lettre d’un Algérien au Parlement européen
Par Youcef Benzatat – Votre résolution contre le régime algérien en date du 26 novembre 2020 est une insulte au peuple algérien. Ce même peuple n’a cessé de vous signifier de ne pas vous mêler de ses affaires intérieures, depuis qu’il a lui-même adopté sa propre résolution contre ce même régime, le jour où il a décidé de prendre son destin en main, en manifestant pacifiquement par millions, depuis le 22 février 2019 et pendant plus d’une année durant. Des manifestations qu’il a suspendues pour cause de pandémie du coronavirus où il a affirmé à l’occasion son sens des responsabilités en empêchant la propagation du virus, pour préserver la santé publique dans le pays.
Il n’a cessé de vous le signifier à vous et à toutes les puissances qui ont pris goût ces dernières décennies à user de rhétoriques cyniques à vouloir exporter la démocratie et les droits de l’Homme au profit des peuples vulnérables, pour finir par semer violences meurtrières et destructions, de soumettre leurs dirigeants et de s’emparer de leurs richesses.
Votre autisme pour le sens profond du Mouvement populaire qui anime la conscience collective de ce peuple depuis cette date, qui est un jalon complémentaire dans le processus de résurgence de la nation algérienne, après le 8 Mai 1945 et le 1er Novembre 1954, se mesure au mépris que vous manifestez à sa volonté de souveraineté et de son désir d’émancipation des entraves néocolonialistes.
La qualification effrontée du caractère «urgent» de votre résolution pour violation des droits de l’Homme dans notre pays, au moment même où ces violations des droits de l’Homme sont perpétrées contre les deux peuples de Palestine et du Sahara Occidental, par leur bombardement meurtrier à Gaza et en territoire occupé sahraoui, trahie votre mauvaise foi et votre manque de sincérité.
Au moment surtout où la violation flagrante des droits de l’Homme par l’agression du peuple sahraoui, par le voisin marocain, est en train de créer un climat de guerre régional dont les conséquences risquent d’être particulièrement tragiques pour la paix civile dans toute la région.
Le caractère insultant de votre résolution contre l’intelligence du peuple algérien s’inscrit surtout dans votre volonté de partition du territoire national et l’incitation à une guerre interethnique, déduite d’une illusoire tension entre ethnies imaginaires que vous aurez créés de toutes pièces par votre référence à une persécution mensongère des habitants de Kabylie que vous nommez les «Berbères». Alors même que vos propres démocraties ont été édifiées sur le bannissement de toute expression ethniciste, en réaction aux génocides et à la barbarie nazie qui a perpétré ses crimes de masse au nom de cette même idéologie ethniciste.
Au moment de la résurgence de la conscience nationale du peuple algérien, dans son étape du 22 février 2020, toutes les ambiguïtés identitaires, entretenues sournoisement par des parties hostiles à notre nation, ont été levées et clairement déclamaient pendant les manifestations populaires. En Algérie, il n’y a que des Algériens, scandaient les manifestants, quels que soient leurs origines ethniques, leurs confessions religieuses, leur couleur de peau, leur sexe ou toute autre différenciation naturelle, cultuelle ou culturelle. En Algérie, il n’y a pas de frontières séparant des ethnies caractérisées par la pureté ethnique.
Les Algériens sont tous des Amazighs métissés avec des populations exogènes et dont le processus de métissage dure depuis près de trois mille ans, depuis l’établissement des premiers comptoirs phéniciens sur les rives sud de la Méditerranée, en passant par l’arrivée en masse des juifs, des Grecs, des Romains, des Byzantins, des Vandales, des Arabes, des Espagnols, des Portugais, des Turcs, des Français et autres Européens venus dans le sillage de la colonisation française et les Africains à la peau noire venus du sud Sahel et de l’Afrique de l’Ouest. Ces apports de populations étrangères continuent à ce jour avec l’arrivée en nombre de travailleurs Chinois qui finissent par s’établir définitivement en se métissant avec la population algérienne pour devenir à leur tour des Algériens à part entière.
Les Algériens dans leur majorité sont conscients que votre résolution s’inscrit dans une campagne d’hostilités contre notre pays, particulièrement depuis votre première résolution de novembre 2019. Cette deuxième résolution coïncide en toute évidence avec une offensive tous azimuts qui tend à devenir de plus en plus agressive et violente. Incendies de forêts, massifs et simultanés, explosions et destructions répétées de structures économiques, provocations permanentes par le biais du voisin marocain jusqu’à la création d’un climat de guerre régional par l’agression contre les Sahraouis à Guergarate, la suspension des visas pour les Algériens de la part des Emiratis et des déclarations d’intention d’ouverture de représentations diplomatiques sur le territoire sahraoui occupé par des parties arabes hostiles à l’Algérie ayant normalisés leurs relations diplomatiques avec l’Etat colonialiste d’Israël.
Mais, surtout, votre dernière résolution où toutes les lignes rouges des convenances diplomatiques ont été franchies et soutenues par un langage injurieux et menaçant, en violation de toute convention diplomatique et de respect de l’intégrité d’un Etat souverain pour signifier une déclaration ouverte des hostilités sous couvert de «la violation inacceptable des droits de l’Homme par le régime algérien». Une justification du moins assez suspecte, d’autant que cette résolution est venue à un moment critique où les droits de l’Homme sont violemment bafoués dans toutes les monarchies arabes et surtout en Israël.
C’est pour toutes ces raisons que votre résolution n’aura aucun effet sur la détermination des Algériens à s’émanciper de l’emprise néocolonialiste ni ne les poussera à pervertir leur mouvement populaire pacifique, pour un Etat civil et démocratique, en une révolte violente contre le régime et contre l’Armée nationale populaire, qui demeure garante de la stabilité du pays et de la préservation de la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale.
Y. B.
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