Pourquoi la décision de Trump sur le Sahara Occidental inquiète les Israéliens
Par Mohamed K. – Times of Israel explique pourquoi la reconnaissance par Donald Trump de la marocanité du Sahara Occidental est défavorable à l’entité sioniste. «Alors que certains voient les similitudes préfigurant peut-être une étape similaire pour le plan d’annexion de la Cisjordanie actuellement suspendu par Israël, d’autres notent que la reconnaissance par Washington des revendications du Maroc sur le territoire [sahraoui] peut avoir des implications de grande portée qui ne jouent pas nécessairement en faveur d’Israël», écrit le journal israélien, dans un article intitulé «Entre Sahara Occidental et Cisjordanie, des épines peuvent poindre pour Israël».
«Israël n’a pas appliqué sa souveraineté sur la Cisjordanie, et il est peu probable qu’il le fasse dans un avenir proche, car une telle démarche pourrait compromettre les récents accords de normalisation avec les Emirats arabes unis – qui n’ont accepté d’établir des liens avec l’Etat hébreu qu’après avoir gelé son offre d’annexion –, le Bahreïn, le Soudan et le Maroc», souligne le journal. «Mais, ajoute-t-il, même s’il le voulait, ce n’est pas si simple. Israël considère lui-même officiellement la Cisjordanie comme un territoire occupé, ce qui signifie qu’il ne peut pas réaliser sa souveraineté sur le territoire de manière unilatérale, et a accepté de déterminer le statut final de la Cisjordanie par le biais de négociations.»
«Il y a des dangers pour Israël qui se cachent dans la décision de Trump d’accorder unilatéralement un territoire contesté à l’une des parties en conflit également. Si les Etats-Unis peuvent simplement déclarer que le Sahara Occidental fait partie du Maroc, qu’est-ce qui empêche les autres pays de reconnaître un Etat palestinien en Cisjordanie ?» s’inquiète-t-on en Israël où l’euphorie est moindre que dans les pays arabes qui se sont jetés dans les bras du Premier ministre contesté chez lui, Benjamin Netanyahou.
«La situation au Sahara Occidental ressemble d’une certaine manière à celle d’Israël, car il n’y avait pas de souverain avant la prise de contrôle par le Maroc», note le média israélien qui fait parler un expert israélo-américain du droit international, selon lequel «le Maroc n’a pas la force des revendications d’Israël, basées sur les frontières antérieures du mandat [britannique], ce qui est une revendication juridique forte». L’expert relève que, contrairement à la Cisjordanie, «qui faisait partie du mandat britannique pour la Palestine depuis la chute de l’Empire ottoman jusqu’au départ des forces britanniques en 1948» et «était occupée par la Jordanie jusqu’à ce qu’Israël la reprenne en 1967, bien qu’elle n’ait jamais été annexée par Jérusalem, et la Jordanie, dont l’annexion n’a jamais été reconnue par la communauté internationale, n’a plus aucune revendication sur elle», au Sahara Occidental, en revanche, «le Maroc a officiellement annexé le territoire – les deux tiers en 1976 et le dernier tiers en 1979 – peu après que l’Espagne s’est retirée de l’ancienne colonie qui abritait des tribus arabes nomades connues sous le nom de Sahraouis».
«Bien que la République arabe sahraouie démocratique ne soit pas un Etat membre de l’ONU, elle a été reconnue par plusieurs pays et est membre à part entière de l’Union africaine», reconnaît le journal israélien qui dédit les thèses marocaines. Times of Israel enfonce le clou : «Un avis non contraignant de la Cour internationale de justice en 1975 a conclu qu’il existe effectivement des liens juridiques d’allégeance entre le royaume et certaines des tribus vivant au Sahara Occidental, mais n’a pas soutenu la revendication de souveraineté territoriale du royaume». Et d’ajouter : «L’avis consultatif de la Cour a plutôt souligné le principe d’autodétermination par l’expression libre et authentique de la volonté des peuples du territoire.»
Faisant le parallèle avec l’occupation israélienne, le journal souligne que «la communauté internationale refuse [de même] presque unanimement de reconnaître les revendications d’Israël sur la Cisjordanie, où vivent quelque 450 000 juifs israéliens et plus de 2,5 millions d’Arabes palestiniens, la plupart des pays qualifiant les implantations israéliennes d’illégales», en rappelant que «le consensus international sur les deux territoires a été rompu par l’administration Trump» et que «dans le cas du Maroc, c’est l’accord du pays pour rétablir ses relations avec Israël qui a fini par renforcer sa demande d’annexion, obtenant la reconnaissance par les Etats-Unis de leur souveraineté sur le Sahara Occidental dans le cadre d’une compensation apparente».
Enfin, le journal attire l’attention sur un fait important : «Alors que les alliés du Maroc ont applaudi cette initiative (la reconnaissance de la marocanité du Sahara Occidental par Trump, ndlr), elle a été controversée dans d’autres milieux. Israël, qui a obtenu des relations diplomatiques avec Rabat grâce à l’accord de Trump, n’a pas officiellement pris position sur la question du Sahara Occidental.»
M. K.
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