La normalisation incitera les juifs marocains à revendiquer leurs biens
L’historien et journaliste palestinien Nawwaf Al-Zarou a averti, mardi, que la reconnaissance par le régime marocain de l’entité israélienne «va créer un climat politique et juridique» qui incitera les juifs marocains à réclamer «les biens qu’ils revendiquent au Maroc» ainsi que «des indemnisations de près de 300 milliards de dollars aux pays arabes», mettant en garde contre les risques que présente ce dossier pour la stabilité du royaume.
Dans un entretien à l’APS depuis Amman (Jordanie), Al-Zarou a signalé l’existence d’une «campagne sioniste acharnée contre le Maroc et les pays arabes qui ont normalisé leurs relations» pour la récupération des «biens revendiqués par les juifs marocains», soulignant que la normalisation «va créer un climat politique propice et leur apporter les motifs juridiques leur permettant d’engager des poursuites pour récupérer les biens dont ils disent avoir été spoliés au Maroc».
L’historien palestinien a, dans ce contexte, fait savoir que l’ambassadeur de l’entité israélienne auprès des Nations unies, Gilad Erdan, a adressé une lettre au secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, le 30 novembre 2020, lui demandant une reconnaissance officielle du statut de réfugiés juifs des pays arabes.
Gilad Erdan a également demandé à l’organisation onusienne de reconnaître les juifs expulsés, d’intensifier les événements mettant en évidence leur héritage et d’entamer des actions en faveur de ce dossier au niveau de l’organisation, a ajouté Al-Zarou.
Pour l’historien palestinien, la requête du représentant de l’entité israélienne à l’ONU réclamant une commémoration pour 850 000 réfugiés juifs qui auraient été expulsés des terres arabes et d’Iran relève de l’impudence quand on sait, a-t-il dit, que «c’est cette entité sioniste qui a spolié la terre palestinienne, violé les droits de son peuple, commis des massacres, déplacé les Palestiniens et confisqué leurs biens».
Il est clair que l’entité israélienne «falsifie les faits en prétendant que ce sont les Arabes qui ont expulsé 850 000 juifs de leurs terres et en réclamant une indemnisation de l’ordre de 300 milliards de dollars pour les biens qu’ils revendiquent», a soutenu le journaliste palestinien, estimant que «les régimes qui ont normalisé leur relations (avec l’entité) leur ont offert une occasion en or».
Les autorités d’occupation israéliennes ont récemment mobilisé leur machine médiatique pour faire la promotion des «réfugiés juifs des pays arabes» et du droit de «récupération des biens ou d’indemnités financières», saisissant pour cela «les deals de normalisation», a indiqué le journaliste palestinien.
Il a cité, dans ce sens, «la campagne frénétique lancée par les juifs marocains» qui chargent de grands cabinets pour ester en justice des citoyens marocains, à l’effet de récupérer des biens immobiliers, des terres et des bâtisses à travers tout le royaume. «En signant cet accord, le gouvernement marocain s’attendait-il à ces graves répercussions sur le Maroc et le peuple marocain ?» s’est-il interrogé.
L’entité sioniste fait du chantage au régime marocain
Le traitement du dossier des «Biens des juifs au Maroc» sera «plutôt juridique que politique», considère cet historien, ajoutant que l’entité sioniste exigera du régime marocain «la restitution de ces biens et avec des indemnités en imposant un chantage, comme ce fut le cas pour l’accord de normalisation».
«L’accord signé par le chef du gouvernement marocain, Saâd-Dine El-Otmani avec l’entité sioniste est similaire aux autres deals de normalisation qui se faisaient sous la pression du chantage avec une logique de force et d’intimidation. Il est clair que la direction de Trump et la direction sioniste ne traitent que par la logique de la force avec certains systèmes arabes», a-t-il précisé.
L’entité israélienne veut «créer un dossier parallèle à celui des réfugiés» appelé «dossier des réfugiés juifs des pays arabes», ajoute l’historien palestinien.
L’auteur palestinien a, par ailleurs, pointé du doigt le contenu du document israélien récemment paru au sujet des réfugiés juifs, lequel stipule que la notion de «réfugié juif» d’un pays arabe s’applique, selon la loi sur les juifs ayant abandonné leurs domiciles dans les pays arabes pour se rendre en Palestine. Ces réfugiés sont recensés, selon la même source, à compter de la date de parution du découpage onusien, de novembre 1947 à 1968.
En chiffres, le document israélien rapporte «entre 800 000 et 850 000 réfugiés juifs, contre 600 000 et 700 000 réfugiés palestiniens durant la même période», révélant «l’importance de consacrer le terme de double réfugié dans le vocabulaire international».
Selon le document, ce serait dans l’intérêt d’Israël de lier la cause des réfugiés juifs à celle des réfugiés palestiniens, en ce sens que «l’Etat hébreux ne devrait pas seulement réclamer des dédommagements personnels des réfugiés juifs d’origine arabe, mais de réclamer l’indemnisation de l’entité sioniste qui a dépensé des ressources pour les avoir accueilli durant les années 1950 et 1960 du siècle passé».
Le gouvernement sioniste œuvrera, tel que prévu, à rendre publique une décision onusienne promulguant le dédommagement des juifs en pays arabes, et s’attèle à présent à mener une large campagne pour la reconnaissance des droits des juifs déplacés et immigrés des pays arabes en les qualifiant de «réfugiés».
Il procédera, dans un deuxième temps, à mener des négociations avec certains pays arabes en vue d’obtenir des indemnités sur les biens abandonnés par les juifs au sein de ces pays.
C’est pourquoi Nawwaf Al-Zarou a jugé «primordial de mettre en échec le plan de normalisation, car constituant une menace stratégique pour la cause palestinienne, voire une nouvelle version de l’invasion sioniste dans ces pays auxquels Israël exigera la restitution des biens des réfugiés juifs et qu’il forcera à verser des indemnités pour avoir utilisé (ces biens) durant bien des décennies».
Dans le même ordre d’idées, l’historien a mis en garde contre les dangers de la normalisation des relations israélo-marocaines sur les pays voisins, déplorant «non seulement la présence de l’entité sioniste qui menace la sécurité, l’économie et le tissu social dans la région, mais également le chaos et les troubles qui séviront, suite à quoi nombre de Marocains perdront leurs biens sous prétexte qu’ils ont appartenu à des juifs marocains».
R. I.
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