Le message subliminal de Netanyahou à Trump, à Mohammed VI et à Tebboune
Par Abdelkader S. – L’apparition du Premier ministre israélien devant une carte géographique comportant une ligne de démarcation nette entre le Maroc et le Sahara Occidental a choqué les Marocains. D’autant qu’il n’y a aucune chance qu’il puisse s’agir d’une erreur protocolaire de la part d’un régime aussi pointilleux que celui de Tel-Aviv. Il y a derrière la carte exhibée de façon ostentatoire par Benyamin Netanyahou, au lendemain de l’annonce par Trump de la normalisation des relations entre le Maroc et Israël, une série de messages adressés de façon subliminale au successeur de Trump, au Makhzen, mais aussi à l’Algérie.
A l’endroit de Joe Biden, le Premier ministre israélien insinue que son gouvernement s’aligne d’ores et déjà sur la nouvelle administration démocrate qui a clairement affiché son opposition à l’attitude de Donald Trump s’agissant de la reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le Sahara Occidental. Israël, qui mise sur une normalisation pérenne avec un certain nombre de pays arabes, ne veut pas que la décision hasardeuse de Donald Trump vienne gripper la machine alors que le chemin de l’établissement de relations stables et pérennes entre l’entité sioniste et le monde arabe est encore long.
Les Israéliens sont pleinement conscients que la précipitation avec laquelle le Président américain vaincu a annoncé la signature de pactes entre quelques pays arabes avec l’Etat hébreu est dictée par un enjeu électoral interne et que cette pacification artificielle menée à la hâte sera, in fine, contreproductive et ne fera pas avancer le processus de paix au Proche-Orient. Bien au contraire. Preuve en est l’exercice militaire d’envergure mené par les factions armées palestiniennes à Gaza, appuyées par le Hezbollah libanais et l’Iran présenté comme le nouvel ennemi des pétromonarchies du Golfe.
Aux Marocains, le chef de l’Exécutif israélien a voulu signifier clairement que la normalisation est à sens unique et que seul Israël a le pouvoir de fixer les règles et de décider des conditions qui doivent régir ses futures relations tant avec le Maroc qu’avec les autres pays qui ont paraphé le traité rédigé à Washington par Jared Kushner sous la supervision du puissant lobby sioniste. Si Donald Trump s’est empressé d’offrir un territoire qui ne lui appartient pas et dont le dossier litigieux se trouve toujours sur le bureau du secrétaire général de l’ONU, le gouvernement israélien ne veut pas braquer sur lui la communauté internationale au moment où il s’apprête à annexer une grande partie de la Cisjordanie. «Normaliser les relations, d’accord ; mettre l’Etat hébreu dans l’embarras, non !» semble dire Benyamin Netanyahou au roi Mohammed VI et à son maître à penser, l’omnipotent André Azoulay.
Mais des observateurs sagaces ont vu dans ce «respect de la légalité internationale» dans le cas sahraoui par Benyamin Netanyahou un appel du pied à l’Algérie dont il ne désespère pas qu’elle finirait par rejoindre les pays normalisateurs. Le Premier ministre israélien aurait ainsi fait un clin d’œil au voisin du Maroc dont le poids dans la région est le seul à même de faire basculer le conflit israélo-arabe dans un sens comme dans un autre. Un ancien proche collaborateur de l’ex-ministre israélien des Affaires étrangères, David Lévy, avait affirmé à un média algérien, en marge de la conférence internationale sur la paix au Proche-Orient qui s’est tenue à Madrid en octobre 1991, que les «Israéliens considèrent qu’aucune paix pérenne ne peut se faire avec le monde arabe sans l’Algérie».
Israël ne perd pas l’espoir de voir l’Algérie effectuer un changement brusque d’orientation, bien que cela relève moins de la realpolitik que de la chimère, tant que des territoires palestiniens et syriens seront occupés et que la politique expansionniste et belliqueuse du régime raciste de Tel-Aviv continuera d’être le credo et le fondement de l’entité sioniste.
A. S.
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