Tabbou fait son cinéma à l’enterrement de l’avocat du FIS Ali Yahia Abdennour
Par Abdelkader S. – La vidéo est virale. On y voit un Karim Tabbou hystérique, s’égosillant jusqu’à en perdre la voix et poussant des deux bras les présents à l’enterrement de l’avocat Ali Yahia Abdennour pour atteindre un représentant de l’Etat encerclé par ses partisans et invité à quitter le cimetière manu militari. «Le transfuge du FFS a ainsi démontré son véritable visage et ce à quoi les Algériens devraient s’attendre si des gens de son acabit venaient à prendre le pouvoir en Algérie», commente un citoyen dégoûté par l’anarchie qui se déroulait sous ses yeux au moment où un mort est accompagné à sa dernière demeure, qui plus est en plein mois sacré du Ramadhan.
Les exclusions violentes des enterrements et des manifestations sont devenues monnaie courante. Sofiane Djilali a été le premier à en faire l’amère expérience, en novembre 2020, lors de l’inhumation de Lakhdar Bouregâa. Comme pour Ali Yahia Abdennour, Karim Tabbou et ses fidèles ont considéré qu’ils étaient les seuls habilités à désigner les personnes qui pouvaient assister à la mise en bière du défunt moudjahid. «Même les enterrements sont politisés», s’est indigné un autre citoyen qui voit dans ces «comportements hérétiques» le signe d’une «transgression de la morale» et d’un «déclin des valeurs».
Les participants à l’enterrement d’Ali Yahia Abdennour ont transformé la cérémonie religieuse où les accompagnateurs de la dépouille se doivent de faire preuve de recueillement et de respect en une manifestation houleuse, virant presque à l’émeute, durant laquelle les mêmes slogans des vendredis ont été scandés. «Pouvoir assassin» et «Vous avez pillé le pays bande de voleurs», entend-on dans la vidéo «qui ne fait pas honneur à ceux qui ont pris part à cette honteuse agitation», fait remarquer un autre citoyen qui s’interroge sur «la capacité de Karim Tabbou et ses acolytes à mener un véritable débat démocratique». «Assurément non», note-t-il, en rappelant que durant tout son parcours au sein du FFS, il n’a jamais été question d’élection mais de cooptation. «Son père spirituel est demeuré président incontesté du parti depuis sa fondation, en 1963, jusqu’à sa mort, et Karim Tabbou a été nommé premier secrétaire par désignation, quand bien même au sein du parti, il y avait plus d’opposants que de soutiens», rappelle-t-il.
Lors du rassemblement de Kherrata, à Béjaïa, le 16 février dernier, c’est une autre figure de proue du Hirak qui a été malmenée par les manifestants. Samir Benlarbi avait été éconduit pour avoir critiqué les agitateurs qui, à partir de Londres, de Genève, de Paris et d’Istanbul, ont récupéré le mouvement de contestation pacifique et l’ont dévoyé de sa trajectoire. Zoubida Assoul a, elle, été abordée par des jeunes, clairement actionnés par les islamistes pour lui signifier, sur un ton menaçant, qu’elle «ne représente pas les Algériens». L’avocate de l’islamologue Saïd Djabelkhir a été soumise aux mêmes invectives à la sortie du tribunal de Sidi M’hamed, à Alger, par un groupe de personnes appartenant à la même obédience.
Dernièrement, c’est Rachid Nekkaz qui a été excommunié pour avoir appelé au dialogue avec le pouvoir car, a-t-il expliqué, «il n’est pas sérieux de continuer à marcher ainsi indéfiniment sans but clair». Cette position lui a valu des critiques acerbes du même groupe qui télécommande le Hirak via les réseaux sociaux et qui neutralise toute personne qui contrarierait ses plans.
Le cinéma de Karim Tabbou, ce lundi, au cimetière en fait partie. Objectif : ne garder à la tête du Hirak que lui, Fodhil Boumala, Mustapha Bouchachi et Nabila Smaïl – tous de la même couleur politique – qui deviennent, ainsi, les porte-parole autoproclamés de la protesta en Algérie, en coordination avec l’opposition islamiste à l’étranger.
A. S.
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