Ex-ambassadeur marocain : «L’Algérie est dans une position confortable !»
Par Kamel M. – Le ministre marocain des Affaires étrangères s’est fait remonter les bretelles par l’ancien représentant du Maroc à New York, Khalil Haddaoui, dans une intervention devant un parterre de députés marocains. Le diplomate, qui a critiqué les incalculables erreurs commises par la diplomatie marocaine, prélude sans doute au limogeage du tonitruant Nasser Bourita, a notamment pointé l’emballement du Makhzen suite à la décision de Donald Trump de reconnaître la marocanité du Sahara Occidental, l’arrogance mal à propos de Rabat face à l’Espagne et à l’Union européenne, les déclarations et communiqués violents et contreproductifs et le scandale des 10 000 migrants clandestins marocains qui ont débarqué à Ceuta avec la complicité des autorités marocaines.
«Notre diplomatie s’est précipitée par rapport à la décision de Trump de reconnaître la marocanité du Sahara [Occidental], il aurait fallu faire preuve de retenue et de sagesse, parce qu’il fallait prendre en considération la personnalité de Donald Trump et le timing de cette décision, c’est-à-dire le 10 janvier, alors que c’en était fini de lui en tant que président des Etats-Unis et que son successeur avait déjà été élu», a affirmé Khalil Haddaoui. «Il fallait aussi attendre de connaître la réaction des Etats membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, parfois on oublie qu’il n’y a pas que les Etats-Unis, mais qu’il y a quatre autres pays, d’autant que nous connaissons l’attitude de la Russie et d’autres pays [la Chine, ndlr] par rapport à cette question», a-t-il ajouté.
«Des Américains eux-mêmes ont fait des déclarations, je cite notamment l’article de John Bolton dans Foreign Policy, une revue qui est lue par des millions de personnes dans le monde», a poursuivi l’ancien diplomate, en précisant que Bolton «est une personnalité connue qui a exhorté Joe Biden, dans son article, de revenir sur la décision de Donald Trump dès la première semaine de sa prise de fonction à la Maison-Blanche». «Bolton a notamment affirmé que le Maroc a peur du référendum», a souligné l’orateur qui semble prédestiné à présider aux destinées de la diplomatie marocaine.
«La diplomatie marocaine a considéré que le problème était réglé alors qu’il n’en est rien en réalité», a fait savoir l’ancien représentant du Maroc à l’ONU, en considérant que «le problème reste posé aux Nations unies à ce jour, et la déclaration de Trump a, au contraire, provoqué la réaction de la Russie, de l’Allemagne, de l’Espagne, etc., qui ont tous fait part de leur rejet de la décision de Trump». «Notre diplomatie a commis une erreur en considérant que la décision de Trump était la solution, surtout que nous avons eu des propos incongrus, comme par exemple en enjoignant à l’Europe de sortir de sa position confortable», a encore affirmé l’ancien ambassadeur pour lequel «c’est un manque de respect à l’égard des Européens».
«Il faut savoir raison garder et savoir peser ses mots», a-t-il conseillé à Nasser Bourita en s’interrogeant : «Qu’est-ce que cela signifie-t-il de s’adresser ainsi à toute l’Europe en ces termes loin des usages diplomatiques ?» avant de conclure : «L’Algérie nous regarde, et c’est elle qui est réellement dans une position confortable.»
K. M.
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