L’ambassadeur d’Algérie à New York dénonce la politique de fuite en avant du Maroc
Hilale droit de réponseNous publions le droit de réponse du représentant permanent de l’Algérie aux Nations unies suite à de nouvelles déclarations hostiles d’Omar Hilale.
«L’ambassadeur du Maroc, certainement à court d’arguments, n’a rien trouvé de mieux que de s’attaquer à l’Algérie en portant de graves accusations contre mon pays et en s’efforçant de l’impliquer en tant que protagoniste dans ce conflit et d’être responsable de la création de ce problème. Si tel était le cas, je rappellerais à l’ambassadeur, qui semble avoir la mémoire courte, que la question du Sahara Occidental a été, et demeure, inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée générale de l’ONU, depuis 1963, et a bénéficié de l’appui de trois pays voisins, à savoir, l’Algérie, le Maroc et la Mauritanie.
Ces trois pays ont fermement soutenu, depuis lors, à l’occasion de chaque session de l’Assemblée générale de l’ONU, le droit du peuple du Sahara Occidental à l’autodétermination et à l’indépendance. Je rappellerais également à l’ambassadeur du Maroc que le Sommet des chefs d’Etat de l’OUA qui s’est tenu à Rabat, au Maroc, en juin 1972, a adopté une résolution sur le Sahara dit espagnol par laquelle les chefs d’Etat africains, dont le roi du Maroc, déplorent la lenteur avec laquelle l’Espagne procède à la décolonisation de ce territoire et engage une fois de plus l’Espagne à instaurer un climat de liberté et de démocratie dans lequel le peuple de ce territoire pourra exercer son droit à l’autodétermination et à l’indépendance dans les plus brefs délais en application de la Charte des Nations unies.
C’est dire, Madame la Présidente, que le soutien du Maroc au droit légitime du peuple du Sahara Occidental à l’autodétermination et à l’indépendance était on ne peut plus clair. Mais au moment où la puissance coloniale a affiché, en 1975, son intention d’organiser un référendum d’autodétermination, le Maroc s’est découvert, contre toute attente, une ambition prédatrice en envahissant le territoire du Sahara Occidental et en affirmant sa vocation d’annexer ce territoire non autonome.
Les observateurs de la scène régionale au Maghreb noteront que cette démarche n’est pas singulière puisque le royaume du Maroc a eu, par le passé, des visées et des prétentions aussi injustes que contestables sur les territoires des pays du voisinage.
Je rappellerais, à cet égard, que le Maroc a, déjà, revendiqué une partie du territoire algérien et s’est livré, en 1963, à une agression militaire en règle contre mon pays qui venait, pourtant, à peine d’accéder à son indépendance.
De la même manière, le royaume du Maroc n’a reconnu la Mauritanie qu’en 1969, soit neuf ans après son indépendance à la suite d’efforts de plusieurs pays de la région, dont l’Algérie, pour l’amener à accepter le principe de l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation, principes par ailleurs consacrés dans les textes fondateurs de l’Union africaine.
C’est dire donc que les déclarations, hélas, mensongères de mon collègue marocain visent à dénaturer les faits et à travestir la réalité, celle d’un conflit de décolonisation qui oppose le Maroc au Front Polisario, qui reste le représentant légitime d’un peuple luttant pour sa libération.
Au risque de le décevoir, encore, je tiens à rappeler à l’ambassadeur du Maroc que l’Algérie, tout comme la Mauritanie, est un pays observateur officiel du processus de règlement de ce conflit ainsi que cela ressort des dispositions pertinentes des résolutions du Conseil de sécurité ainsi que des documents connexes des Nations unies.
A ce titre, l’Algérie n’a eu de cesse, en sa qualité de pays voisin, de prodiguer ses encouragements aux deux protagonistes, le royaume du Maroc et le Front Polisario, et d’apporter tout le soutien nécessaire aux efforts du secrétaire général et de son envoyé personnel dans la recherche d’une solution juste et durable devant pourvoir à l’exercice par le peuple du Sahara Occidental de son droit à l’autodétermination et à l’indépendance.
Bien qu’il soit établi que le royaume du Maroc a le triste statut d’occupant au regard du droit international, son représentant auprès des Nations unies s’efforce dans une démarche maladroite matinée de rhétoriques mensongères, de dédouaner son pays de toute responsabilité dans la genèse et la persistance de ce conflit.
Aussi se livre-t-il à des attaques pitoyables et sans fondements sur la situation des réfugiés dans les camps de Tindouf que l’Algérie accueille généreusement dans le strict respect de ses responsabilités en tant que pays hôte. Dans ce cadre, mon pays entretient une collaboration exemplaire avec le HCR qui organise des visites régulières ainsi qu’avec l’Unicef, le PAM et le CICR. La présence régulière et le travail exemplaire accomplis par ces acteurs humanitaires dans les camps de réfugiés sahraouis permet de démentir catégoriquement les allégations mensongères du Maroc sur une prétendue séquestration de réfugiés, militarisation des camps et endoctrinement des enfants sahraouis qui n’existent que dans l’imaginaire des autorités marocaines.
Avant de conclure, j’aimerais rafraîchir la mémoire de mon collègue marocain en lui rappelant que le processus de paix au Sahara Occidental est à l’arrêt depuis que le Maroc a décidé unilatéralement de remettre en cause la dynamique onusienne, en mettant en doute la sincérité et la probité de l’envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU et, ensuite, en considérant l’option référendaire comme définitivement écartée, contrevenant ainsi à l’appel répété du Conseil de sécurité à la reprise des négociations de bonne foi, et sans conditions, entre le Maroc et le Front Polisario.
L’attitude du Maroc témoigne de sa mauvaise foi
La délégation marocaine s’est, comme à l’accoutumée, singularisée par des accusations gratuites et fantaisistes contre mon pays, excellant ainsi dans ce qu’elle pratique le mieux : l’art de la duplicité. En cela, je dois reconnaître qu’elle reste profondément fidèle à une habitude ancienne forgée dans la haine aveugle de l’Algérie.
Ma délégation ne peut, dès lors, que déplorer, encore une fois, que les mêmes attitudes persistent et que le Maroc, plutôt que de s’engager, de manière sincère et loyale, dans la décolonisation du Sahara Occidental, ait trouvé dans la phobie contre l’Algérie un exutoire pour occulter les vrais problèmes.
Il est, en effet, déplorable et condamnable que Rabat qui a imposé la loi du silence dans le territoire du Sahara Occidental, qui entrave l’exercice par le peuple du Sahara Occidental de son droit à l’autodétermination, qui empêche l’avènement de la paix dans la région et qui bloque toute perspective de relance de l’intégration maghrébine, s’attache, aujourd’hui, à prendre en otage ce Comité en lui dictant ce qui doit être fait et en érigeant le mensonge et la mauvaise foi en vertu politique.
Naturellement, le royaume du Maroc n’a aucun droit moral de s’ériger en donneur de leçons, surtout lorsqu’on connaît sa politique expansionniste basée sur un système de répression totale, son manque de respect pour la légalité internationale et le peu de cas qu’il fait de la communauté internationale.
La délégation marocaine doit réaliser que l’embargo médiatique qui pèse sur la question du Sahara Occidental ne pourra pas détourner l’attention de la communauté internationale sur la situation qui prévaut dans ce territoire.
Le refus du Maroc d’autoriser les ONGs, les organes issus des mécanismes onusiens des droits de l’Homme, les parlementaires et les journalistes de se rendre dans les territoires occupés montre clairement la crainte du Maroc de voir sa politique mise à nu et les graves violations des droits de l’Homme dont les disparitions forcées et les exécutions, les restrictions aux libertés individuelles et les multiples exactions perpétrées contre le peuple du Sahara Occidental portées à l’attention de la communauté internationale. En un mot, il veut par une telle attitude flouer la communauté internationale et masquer les graves dérives dont il est responsable.
En définitive, cette attitude témoigne de la mauvaise foi du Maroc et de son refus de s’inscrire dans une démarche visant le règlement sincère et de bonne foi du conflit du Sahara Occidental.
L’ambassadeur du Maroc a cru devoir évoquer la situation des droits de l’Homme en Algérie, comme si l’état des droits de l’Homme dans mon pays était comparable à la situation de violations systématiques des droits humains qui prévaut au royaume du Maroc et sur le territoire du Sahara Occidental. De ce point de vue, mon collègue marocain serait assurément mieux inspiré de se préoccuper d’abord de la situation qui prévaut au Maroc où la violation des droits de l’homme est érigée en système généralisé qui s’est malheureusement étendu au territoire du Sahara Occidental.
A l’évidence, ces propos de l’ambassadeur du Maroc se situent largement en porte-à-faux avec les données réelles du terrain, telles qu’elles ressortent des constats établis par les organisations internationales.
Je n’en veux pour preuve que le dernier rapport du secrétaire général à l’Assemblée générale de l’ONU qui souligne que le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme demeure préoccupé par la tendance persistante à restreindre les droits à la liberté d’expression, de réunions pacifiques et d’association au Sahara Occidental par les autorités marocaines. Au cours de la période considérée, le HCDH a reçu des informations faisant état de harcèlement, d’arrestations arbitraires et de condamnations de journalistes, d’avocats et de défenseurs des droits de l’Homme.
Il en va de même de Mme Mary Lawlor, rapporteur spécial sur les défenseurs des droits de l’Homme, qui, le 1er juillet 2021, a dressé sans aucune équivoque, le bilan inquiétant des violations systémiques des droits de l’Homme qui se déroulent au Sahara Occidental, dernière colonie d’Afrique, et qui sont aux termes de Madame Lawlor abominables et heurtent la société tout entière. Elle y déplore le fait que non seulement les défenseurs des droits de l’Homme au Sahara Occidental continuent à être criminalisés pour leur travail et emprisonnés de manière disproportionnelle mais font l’objet de traitements cruels, inhumains et dégradants et de tortures. Elle y dénonce également l’acharnement systémique et sans pitié à l’encontre des personnes exerçant leur droit à l’expression et à l’association au Sahara Occidental.
Par ailleurs, les propos du représentant permanent du Maroc concernant une région de mon pays constitue une manœuvre destinée à cultiver un amalgame outrancier entre une question de décolonisation dûment reconnue comme telle par la Communauté internationale et ce qui n’est qu’un complot dirigé contre l’unité de la nation algérienne. Ces propos confirment une fois de plus la politique hostile que le Maroc mène à l’égard de l’Algérie et le soutien qu’il accorde aux actions déstabilisatrices d’organisations terroristes.
C’est dire donc, Madame la Présidente, que les propos de l’ambassadeur du Maroc participent d’une politique de fuite en avant et de perversion des réalités.
Cette politique est vouée à l’échec. L’Algérie, pour sa part, demeurera fidèle à sa doctrine et aux principes cardinaux qui ont toujours guidé sa politique étrangère dont le droit à l’autodétermination. Ni les accusations mensongères, ni les calomnies malsaines ne sauraient altérer l’engagement de l’Algérie en faveur des principes et des objectifs de la Charte des Nations unies.»
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